Les demoiselles de Pont Haut avant 1900
Une glaciation se caractérise par le recouvrement d'une partie de la surface du globe terrestre
par une ou plusieurs calottes glaciaires plus ou moins vastes et épaisses. Au cours de l'histoire
de la Terre, cinq périodes de glaciation ont pu être identifiées. Deux glaciations importantes
se sont produites au Précambrien, deux pendant le Primaire et nous sommes actuellement dans la dernière
qui a débuté il y a environ 35 millions d'années.
Les périodes de glaciation, relativement courtes, ont été séparées par de longues périodes au cours
de laquelle la Terre ne présentait pas de calottes glaciaires étendues. Parmi ces périodes, la plus connue,
car la moins ancienne, correspond au Secondaire et première moitié du Tertiaire, une période longue
d'environ 215 millions d'années.
Entrée dans la période glaciaire actuelle dans la fin du Tertiaire :
A -50 Ma (début Eocène) la température des masses d'eau océaniques est voisine de 15°C.
A -35 Ma (fin Eocène) elle a chuté à 11°C en surface et à 9°C en profondeur, développement des glaciers
de montagne sur l'Antarctique (qui est au pôle sud depuis -100 Ma) et il se produit à nouveau
un refroidissement important qui entraîne une diminution de l'ordre de 6°C de la température
des eaux de fond.
Un nouveau refroidissement majeur vers -13 Ma avec un accroissement de la calotte glaciaire de l'Antarctique.
Il y a environ 6 Ma, une nouvelle période de refroidissement coïncide avec le développement de glaciers
sur les sommets andins. Dans l'hémisphère nord, la formation des glaces est encore plus récente.
Elle intervient entre 3 et 7 Ma sur le Groenland, mais des calottes glaciaires de taille importante
ne sont apparues qu'à 2,7 Ma.
Depuis cette dernière date, le climat est une succession de périodes glaciaires pendant lesquelles des régions
habituellement tempérées sont recouvertes d'immenses glaciers et de périodes interglaciaires comme la période
actuelle où les glaciers régressent vers les hauteurs.
Les cycles de variation de température qui au début étaient de 40000 ans passent à 100000 ans vers 1 Ma. Pour expliquer ce phénomène une étude internationale est lancée en novembre 2016 : A la recherche de la glace la plus ancienne sur Terre, on espère atteindre de la glace d'au moins 1,5 Ma par forage dans l'Antarctique.
Changement du rythme des glaciations, 40 ka puis 100 ka.
.
Pour plus de détails sur le refroidissement de la Terre durant le Tertiaire, consulter la première partie de la conférence "
La Mure sous les glaces".
La notion d'échelle de temps est importante :
- A l'échelle géologique (plusieurs millions d'années) nous vivons
dans la période glaciaire commencée
à la fin du Tertiaire.
- A l'échelle des derniers 500 000 ans nous vivons
dans un stade interglaciaire.
Elle devait être à une altitude supérieure à l'actuelle, on peut retenir l'estimation de Guy Montjuvent : entre 1800 et 2000 m.
Les cours d'eau sont antérieurs à la remontée de Belledonne, ils devaient avoir des lits voisins des lits actuels mais peu profonds car uniquement soumis à l'érosion torrentielle. Le plateau est encore en continuité avec son voisinage.
Le relief était peu marqué.
Sylvain Coutterand : « Depuis la fin du pliocène et le début du pléistocène, il y a plus de deux millions d'années, le massif alpin a connu l'alternance de nombreuses périodes glaciaires et interglaciaires. C'est probablement vingt à vingt cinq glaciations qui se sont succédées depuis 2,5 millions d'années. »
Le scénario devait être approximativement le même à chaque glaciation : le glacier de la Romanche avec les trois langues diffluentes concernant la Matheysine : seuil de La Morte, de Laffrey et du vallon des Mottes ; le glacier du Drac et de La Bonne.
Pour chaque début de glaciation (anaglaciaire) il fallait d'abord que le glacier remplisse la vallée avant d'arriver sur notre domaine, c'était facile au début car les vallées étaient encore peu creusées et comme le relief était faible il avait accès à une bonne partie du territoire d'où les traces de passage de glaciers que l'on voit sur les hauteurs du Connex, Senépi, Grand-serre, Tabor et Piquet de Nantes. De même avant la fin des glaciations (cataglaciaire) le glacier avait rejoint sa vallée. Il n'érodait donc que pendant une partie du temps.
Au fur et à mesure, les glaciers approfondissent les vallées qui nous entourent, isolent la Matheysine et créent du relief sur le plateau ce qui fait que les sommets sont plus difficilement accessibles et n'ont pas été affectés par les dernières glaciations. L'érosion glaciaire, très efficace ne concerne que les zones englacées, les sommets sont à l'abri de cette érosion, le relief s'amplifie au cours du temps.
Jusqu'à une certaine période où le relief était encore peu accentué, les glaciers ont atteint les points aujourd'hui hauts comme le Connex à l'ouest (photo du haut) ou le Piquet de Nantes à l'est (photo ci-contre).
Nous allons montrer que l'érosion sélective des glaciers n'agit pas seulement sur la création des reliefs mais a aussi comme effet de remonter les sommets. Pour expliquer simplement cet effet, dont on a pris conscience récemment, il est intéressant de faire une digression vers le comportement des icebergs.
Un iceberg a les 9/10 de sa masse immergés, si on lui ôte (schéma ci-contre, les parties enlevées sont en bleu) :
- 1, la moitié de sa masse émergée de façon uniforme, l'iceberg remonte de 0,45, il apparaitra moins haut de 0.05.
- 2, la moitié de sa masse émergée mais de façon non uniforme, il remonte de la même façon et les parties hautes vont remonter de 0,45. Bien qu'allégé, mais de manière sélective, il apparaitra plus haut.
La croûte continentale de densité moyenne de 2,7 plonge dans le manteau de densité 3,3 de façon analogue à l'iceberg, 1/5 de la croûte émerge et les 4/5 sont dans le manteau (isostasie). Cet équilibre est maintenu au cours de l'évolution de l'épaisseur de la croûte mais avec des temps de réponse relativement longs en cohérence avec la vitesse des mouvements terrestres.
Les trois schémas ci-dessous expliquent les résultats de l'érosion glaciaire sélective sur l'accentuation du relief et la remontée des sommets moins érodés que les vallées :
- A. Les érosions successives des glaciers qui au début ont facilement débordés leur vallée encore peu profonde et se sont répandus sur une grande partie du plateau puis de plus en plus difficilement par l'approfondissement des vallées et l'augmentation du relief.
- B. La différence e entre les niveaux d'érosion du début et après quelques glaciations, la remontée cumulée de 4/5e.
- C. L'évolution du relief et des altitudes, les sommets moins érodés sont constamment remontés en altitude.
Les glaciers déposent une partie des produits d'érosion : moraines et remplissages des lits de rivières. La plupart de ces dépôts seront déplacés et emportés par le fluvio-glaciaire lors du recul du front glaciaire ou plus tard lorsque les cours d'eau recreusent leur lit.
La moraine de Cholonge est la moraine latérale des glaciers du Drac et de la Romanche qui se retirent en sens opposés à la fin du Riss. La page suivante détaille le magnifique arc morainique de La Mure que nous a laissé la dernière glaciation du Würm.
Le Drac a, après chaque glaciation, recreusé son lit ce qui entraîne des éboulements de ses berges qui se prolongent encore de nos jours.
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
Deux sites internet à recommander, bien documentés, bien illustrés et à la pointe des connaissances :
- www.geoglaciaire.net de Claude Beaudevin
- www.glaciers-climat.com de Sylvain Coutterand, voir la carte des
trajets des différents glaciers. Il attribue la remontée des vallées de la Gresse et des Mottes au glacier de la Romanche
et non au glacier de l'Isère comme le pensait Guy Montjuvent.
Et pour la morphologie locale,
la thèse de Guy Montjuvent : Le Drac, morphologie, stratigraphie et chronologie
quaternaires d'un bassin alpin.