Géologie

- Histoire géologie
- Socle Matheysine
- Carbonifère
- Trias
- Spilites
- Blocs basculés
- Sédiment. secondaire
- Orogenèse alpine
- Le Tertiaire
- Glaciations
- La dernière glaciation
- Stratigraphie actuelle
- Géologie / Matheysin
- La Mure/Arc morainique
- Minéraux de collection
- Climats du passé

LE CHARBON

photo d'une fougère
Pecopteris lamurensis, une fougère dont le génotype a été défini à La Mure.

Les bassins houillers du Carbonifère

Les grandes failles hercyniennes, dans leur déplacement, ont créé des bassins subsidents (ils s'enfoncent au fur et à mesure qu'ils se remplissent). En France on a 60 bassins dans le massif central, de grandeurs inégales, créés par d'importantes failles dont la plus connue est le grand Sillon houiller. Ceux créés par l'Accident Médian de Belledonne sont plus modestes, le plus important étant celui de La Mure, le seul qui a été exploité de façon industrielle.

On schématise la formation des bassins le long des failles par les deux dessins équivalents ci-contre.



La France est juste en dessous de l'équateur dans la zone tropicale où se développe une végétation exubérante. Les forêts sont régulièrement détruites par des avalanches, des inondations, des effondrements suite aux événements compressifs et distensifs qui se succèdent dans le temps et dans l'espace. La matière organique s'entasse dans les bassins et elle est rapidement recouverte par les grès provenant de l'érosion de la chaîne hercynienne, ce qui la protège de l'oxydation. De nouvelles forêts se développent et subissent le même sort, le cycle se reproduit durant quelques millions d'années.

carte climat au Carbonifère
La France, localisée à l'époque au point rouge, se situe au-dessous de l'équateur dans la zone tropicale.
Carte tirée du site web www.scotese.com

végétation au Carbonifère
Les arbres des forêts du Carbonifère sont différents des arbres actuels, la reproduction se fait par les spores, la graine et la fleur n'apparaîtront qu'au Crétacé.

Les forêts carbonifères

La flore a fait son apparition sur la Terre au Silurien et s'est réellement installée au Dévonien. Dans les endroits humides, les Charophytes et les Mousses apparaissent tandis que s'accentue le développement des champignons. Mais la conquête des continents se fait surtout avec le développement des Ptéridophytes (plantes composées de racine, tiges et feuilles, mais sans fleur ni graines, la reproduction se faisant au moyen de spores). Au Carbonifère les forêts sont luxuriantes dans la zone tropicale.

Qui sont les habitants de ces forêts ?
- les insectes, en grande quantité, car ils ont été les premiers à conquérir le ciel dès les premières végétations. Ils n'ont pas encore beaucoup de prédateurs ce qui explique leur importance et leur gigantisme (des libellules primitives de 70 cm).
- des scorpions de 75 cm, des blattes et des mille-pattes gigantesques
- des vertébrés, les amphibiens, issus des poissons qui se sont aventurés hors de l'eau, se sont diversifiés mais ils pondent toujours leurs oeufs dans l'eau. Une nouvelle classe de vertébrés est apparue, les reptiles qui pondent leurs oeufs, moins nombreux mais plus gros, sur la terre ferme.


Méganeura, une libellule géante de 70 cm.


un tronc de calamite dans du grès
Un tronc de calamite (diamètre de 30 cm) dans du grès houiller
photo prise dans l'Esterel


L'un des premiers reptiles, Petrolacosaurus, explore le sol jonché de débris d'une forêt du Carbonifère
Illustration du livre de Stephen Jay Gould, Le livre de la vie.


Fossile de fougère décoré par la pyrite. Musée matheysin


Arthropleura, un arthropode à carapace qui pouvait atteindre 2 à 3 m.




Fossile de fougère. Musée matheysin.

Dans le bassin de la Mure, la flore est abondante et diversifiée, on a même défini le génotype d'une espèce de fougère : Pecopteris lamurensis (photo de haut de page), par contre la faune est beaucoup plus limitée : débris de poissons d'eau douce, lamellibranches, petits crustacés, empreintes d'ailes d'insectes.

Bassin de la Mure

Pour bien comprendre les caractéristiques du bassin houiller il faut voir sa dynamique sur une très longue période, malheureusement un temps très long (environ 60 Ma) ne nous est plus accessible, comme on peut le constater à la discordance des Chuzins, toutes les traces de la fin du Carbonifère et de la totalité du Permien ayant disparues. On pense aujourd'hui que l'accident médian de Belledonne générateur du bassin a fonctionné encore pendant une grande partie du Permien. Pendant l'approfondissement du bassin par subsidence du fait de son remplissage progressif d'argiles, de grès et de couches de matière organique végétale qui donneront le charbon, sa géométrie va être modifiée, de séismes en séisme lors de la progression des failles.

Ce contexte a été en même temps une chance et un problème (impossibles à pondérer). Une chance puisque ces déformations, enfoncement de couches, fermeture partielle, ont pu préserver des couches que l'on a pu exploiter. Un problème car le bassin est très déformé, l'exploitation butte sur des failles et les couches sont pentées.

En résumé on peut raisonnablement proposer le scénario suivant :

 - Dans la dernière partie du Wesphalien (D), formation du bassin et début du remplissage, pas de Houiller mais des conglomérats et des grès.
 - Pendant le début du Stéphanien (A) c'est le Houiller productif
 - Pendant la suite du Stéphanien (B et C), dont il ne reste plus de traces, que s'est-il passé ? Probablement comme au stade précédent, dépôt de Houiller productif avec les alternances de grès, schistes et couches de matière organique.
 - Pendant le Permien, totalement absent sauf aux Rouchoux (grès rouges), par comparaison avec d'autres endroits, on peut supposer qu'au début le Houiller continue, puis il disparaît sous l'effet du changement de climat. Les produits du démantèlement s'entassent et sont transportés plus loin par les crues des torrents, l'érosion continuant va finir par affecter les couches de Houiller. Les failles continuent leur décrochement et déforment le bassin.
 - Fin de l'ère primaire, le calme revient, l'accident médian a terminé son déplacement, mais sur le sol émergé et pénéplané, l'érosion continue.
 - Pendant une bonne partie du Trias la région reste émergée donc en position d'érosion alors que la mer triasique baigne depuis le début les régions plus au nord-est.
 - A la fin du Trias moyen la mer arrive pour une très longue période pendant laquelle les dépôts sédimentaires vont enfoncer le Carbonifère, le charbon va lentement s'élaborer. Les différentes couches vont se compacter, d'un facteur 3 pour les grès mais jusqu'à un facteur 10 pour le charbon. Une couche actuelle de 1 mètre correspond au départ à 10 mètres de matière organique.
 - L'orogenèse alpine, le plissement des strates, les glaciations successives et l'érosion qui en découle vont remonter ce houiller ce qui en permettra l'exploitation.

Les figures ci-dessous montrent la complexité du bassin houiller. Les déformations au cours des dépôts, l'extension jurassique et les déformations alpines ont rendus difficiles les conditions de l'exploitation du charbon.


Coupe théorique de la stratigraphie des couches d'anthracite, la réalité, après toutes les contraintes, est aujourd'hui bien différente comme le montre les deux exemples ci-contre.
Les 3 coupes sont tirées du livre de Charles de Marliave, Les mines d'Anthracite de la Mure (1806-1946), 1955.




Les couches de la Grand'Draye et du Villard à la Motte-d'Aveillans



Les couches du Villaret



Le schéma ci-contre, tiré d'un article de Jean Haudour et Jean Sarrot-Reynaud, montre le réseau de failles de l'exploitation du Villaret. Ce plan est tracé à la cote 770 (niveau 15).
Surchargés en rouge, l'accident médian, les failles de même direction nord-sud et les failles est-ouest.
Les points bleus indiquent les 2 puits (Villaret et Les Rioux).
les galeries sont rectilignes en gris et on voit les couches de charbon parfois décalées par les failles : en noir la Grande couche au niveau 15 et en hachures la Grande couche au niveau 12.

Des forêts tropicales au charbon

Pendant des millions d'années les luxuriantes forêts régulièrement détruites généraient une grande quantité de matière organique. Aujourd'hui un arbre déraciné est rapidement attaqué par les insectes xylophages et par les champignons saprophytes (capable de se nourrir de matière organique). Qu'en était-il à l'époque ? Un article de Science de 2012 fait apparaître ces champignons à la fin du Carbonifère et en fait la cause de la fin de la fossilisation du bois. Il faut toutefois noter que la formation de charbon ne s'est pas limitée au strict Carbonifère, l'étage suivant, le Permien, dans sa première partie, a été encore un grand fournisseur et ensuite la variation du climat a joué un rôle important dans la diminution des forêts.
Le bois doit être mis rapidement à l'abri de l'air, c'était facile dans les grands bassins en bord de mer, probablement plus difficile dans le cas murois de petit bassin continental lacustre mais les grès, argiles venant de la destruction de la chaîne contribuaient à cette protection.
En surface et à faible profondeur la matière organique est désorganisée par les bactéries aérobies puis anaérobies (perte de O, N et S). Ensuite c'est la température qui poursuit cette dissociation et les réorganisations moléculaires.
La matière organique, à cette étape contient une fraction insoluble dans des solvants organiques : le kérogène (le constituant majoritaire) et une fraction soluble : le bitume (quelques %).
Au cours de la catagenèse et de la métagenèse, au fur et à mesure de l'enfoncement donc de l'augmentation de la température, le kérogène va évoluer par pyrolyse, perdre d'abord de l'oxygène, puis de l'hydrogène. On passera les différents stades : tourbe, lignite, houille et dans le cas de la Mure on arrivera au stade anthracite. Le charbon aura perdu le gaz CH4, le méthane appelé grisou dans les mines.


courbe de transformation du kérogène en charbon
Schéma de l'évolution au cours de l'enfoncement.


La catagenèse de 80°C (-2000 m) à 120°C (-4000 m)
La Métagenèse de 120°C à 200°C (-6000 m)
Les profondeurs sont approximatives car données en fonction du gradient moyen actuel de 30°C/km.
A quelle profondeur a été porté le bassin houiller situé sur le rameau externe ? On peut admettre, en admettant la même stratigraphie que que dans les régions voisines, qu'il s'est déposé pendant le secondaire les 6000 m permettant une métagenèse importante.

Le travail de la mine et le patrimoine houiller

Ces points ne seront pas abordés, hormis les débuts de l'exploitation moderne à la Grande draye. Il existe de nombreux livres, articles sur le sujet. On peut déplorer que nos édiles, après la fermeture de la mine, n'aient pas voulu ou pas su valoriser le patrimoine qui disparaît progressivement. Heureusement que d'anciens mineurs regroupés en association ont créé la mine image pour en conserver le souvenir.

Nous consacrons une page dans la rubrique histoire pour contredire l'idée reçue de la richesse de La Mure du fait de la mine, il n'y a pas de charbon sur le territoire de la commune ce qui n'a pas empêché l'appellation "Compagnie des mines de La Mure".

Nous faisons remarquer que le charbon, longtemps enfoncé à plusieurs kilomètres de profondeur, s'est trouvé localement, après la tectonique alpine et de nombreuses érosions glaciaires, à portée de main de nos ancêtres.

Remarque sur les grandes accumulations de charbon

A l'échelle des temps géologiques, la distribution des roches riches en matière organique n'est pas uniforme. Pour le charbon, on constate que les principales accumulations se sont faites au cours de cinq intervalles :
 - le Carbonifère supérieur (13 % des réserves actuelles)
 - le Permien (30% des réserves)
 - le Jurassique inférieur (12% des réserves)
 - le Crétacé inférieur (15% des réserves)
 - le Paléogène (25% des réserves, surtout ligniteuses).
On constate que bien que le Carbonifère tire son nom de sa richesse en charbon, le Permien et le Paléogène le dépassent largement en terme de quantité.
Source : le livre sur la matière organique cité ci-dessous.

Pour ceux qui veulent en savoir plus :
Pour la formation du charbon, un livre très intéressant sur un composant singulier des roches : Géologie de la matière organique de F. Baudin, N Tribovillard et J. Trichet, chez Vuibert
Pour le Houiller matheysin il existe une importante bibliographie (accessible en grande partie sur internet) : J. Haudour, J. Sarrot-Reynaud, C.-H. Angelier... Articles qui datent d'avant la tectonique des plaques que l'on doit corriger en fonction de ce qui est dit dans cette page en ce qui concerne la formation du bassin et ses déformations.
J. Sarrot-Reynaud, Étude géologique de la couverture mésozoïque du dôme de la Mure
Page Matheysine de Geol-alp.

↑MENUS↑