Géologie

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L'OROGENÈSE ALPINE

un plissement dans le bord du Dévoluy près de Tréminis
Un gros banc de Tithonique plissé et redressé (bordure du Dévoluy vers Tréminis)

Depuis Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799) qui fut un des premiers à étudier les Alpes, à la recherche de la Théorie, des générations de géologues ont travaillé sur ce sujet. Une grande avancée a été accomplie avec "la tectonique des plaques" à partir de 1980 mais de nombreuses questions restaient encore récemment posées :
- quelles altitudes ont été atteintes par la chaîne au cours du temps ?
- comment expliquer les failles d'extension dans la zone interne ?
- pourquoi le point culminant (le Mont-Blanc, 4 810 m) se trouve en zone externe ?
- qu'est devenue la plaque plongeante, s'est elle détachée, quand ?
Dans cette page nous tenons compte des études en cours organisées par l'Agence Nationale de la Recherche (référence en bas de page) dont une section étudie les Alpes anciennes par leur débris dans les bassins. Les chercheurs apportent des pistes de réponse crédibles aux questions posées.

Les Alpes dans le temps

Les reliefs alpins sont récents mais sont le résultat d'une très longue histoire tectonique qui s'est passée en profondeur sous l'eau, on peut en donner les étapes principales :

* Trias supérieur - La première manifestation est le volcanisme triasique, la Pangée se fissure, l'océan atlantique central va commencer à s'ouvrir et la Matheysine à l'intérieur du Dauphinois se trouve sur la marge ouest d'un futur océan, dans une région en distension.

* Lias - Le rifting : des failles importantes affectant l'épaisseur de la croûte continentale donnent les blocs basculés, une ce ces grandes failles traverse la Matheysine qui est à cheval sur deux blocs (l'Accident Médian de Belledonne).


            L'océan vers 140 Ma.

* 165 Ma (fin Jurassique moyen), c'est l'ouverture océanique, quelques blocs plus loin au sud-est, qui donne naissance à l'océan liguro-piémontais. L'Afrique s'éloigne en direction de l'est-sud-est.

* 100 Ma (début Crétacé sup.) : le contexte change car l'Afrique change de direction et revient vers le nord. La zone qui était en extension passe en compression. L'océan, dont on ignore la largeur maximum qu'il atteint (estimations qui vont de 250 à 2000 km), entre en subduction : la plaque européenne plonge sous une petite plaque, la plaque apulienne qui sert de relais à la compression de l'Afrique.


Situation vers 80 Ma (figure Agard et Lemoine), l'océan est entré en subduction, les sédiments , à la marge est de l'océan sont entassés dans un prisme d'accrétion.
Les différents domaines impliqués ; Dauphinois, Briançonnais, Piémontais et Liguro-piémontais (on ne mentionne pas le Subbriançonnais et l'Ultra dauphinois et dans la suite on regroupera le Piémontais et le Liguro-piémontais). La position de la Matheysine est représentée par le rond jaune.

* De 100 à 45 Ma pendant le Crétacé sup. et le début du Tertiaire c'est la subduction océanique, sont concernés la croûte océanique et les sédiments déposés dans l'océan, une partie est éjectée sous forme de flyschs, une autre est entraînée dans la subduction, et va subir un métamorphisme important et remontera (le mont Viso) ou disparaîtra dans les profondeurs, la plus grande partie constitue le prisme d'accrétion. Une partie de la croûte océanique (le futur Chenaillet) échappe à la subduction.
La sédimentation continue sur tous les domaines.


Ce schéma et les 4 suivants sont extrait de la thèse de Sébastien Jourdan (2012).

Plissement anté-Sénonien
Pendant le Crétacé supérieur, une bande de terrains, principalement le Dévoluy, subit des plissements de direction est-ouest. Ceux-ci, qui n'affectent que la couverture, sont dus à l'histoire précoce des Pyrénées, la plaque Iberia après des phases d'extension, de coulissage est venue poinçonner, dans sa partie la plus orientale, le sud de la France. On ne trouve pas de traces de plissement de cet époque dans la partie sud, c'est peut-être dû au glissement de la couverture sans déformation sur le Trias.
L'explication alternative proposée par André Michard en 1986 à savoir un glissement synsédimentaire majeur sur la pente de la bordure nord du bassin vocontien, n'est pas retenue, il y a eu des glissements gravitaires locaux mais limités.

* Vers 45 Ma, la subduction océanique se termine, c'est au tour de la marge continentale du Piémontais et du Briançonnais d'entrer dans la subduction. Des unités seront fortement métamorphisées, le massif de Dora Maira est entraîné jusqu'à une profondeur de 100 km). Le Briançonnais perd sa structure, il est découpé en écailles : les nappes briançonnaises.

* Vers 35 Ma, la subduction continentale est bloquée, on passe à un contexte de collision avec des structures chevauchantes majeures.
La plaque plongeante se rompt ce qui provoque de grandes conséquences :
     - les roches légères qui étaient entraînées malgré elles peuvent rebondir.
     - retrait de la subduction avec des failles d'extension.
     - changement de direction de convergence de l'Apulie et de la plaque européenne, la direction devient est-ouest.
     - Jusqu'à maintenant la chaîne était de hauteur modeste, le taux d'exhumation était de 0,4 km/Ma et subissait de l'érosion.


Collision et rupture de la plaque plongeante.

Pour mémoire
Dans le sud, durant l'Eocène, se produisent les plis pyrénéo-provençaux qui ne remontent pas au-dessus des Baronnies.

* Vers 30 Ma la chaîne va prendre de la hauteur pendant 2 à 3 Ma avec un taux d'exhumation de 1,5 à 2 km/Ma pour revenir ensuite à la vitesse précédente.


Les premières altitudes importantes de la chaîne très dissymétrique en pente raide à l'est et pente progressive à l'ouest, les bassins avant-chaîne reçoivent les produits d'érosion.

* Vers 25 Ma le Dauphinois rentre dans la collision mais il ne subira pas le sort du Briançonnais, les structures sont conservées. Les massifs cristallins externes (Mont-Blanc, Belledonne) sont soulevés et comprimés.
Les Alpes ont une hauteur de l'ordre de 3 000 m avec des reliefs beaucoup plus mous qu'aujourd'hui, les produits de l'érosion arrivent dans les bassins d'avant chaîne.

* La ligne de partage des eaux à peu changé depuis 30 Ma.

Les altitudes supérieures à 4000 mètres sont récentes, moins de 5 Ma.
Nous verrons que les reliefs récents à actuels sont formés par incision glaciaire.



Janvier 2019
Ce paragraphe devra être réécrit. Aujourd'hui, on remet en cause la nature de l'océan Liguro-Piémontais, ce n'est pas un océan au sens propre car il ne posséde pas la croûte océanique classique produite par le volcanisme à la ride. Océan à ouverture très lente, il s'est ouvert par dénudation tectonique : du fait de l'étirement de la croûte continentale le manteau est remonté, le fond de l'océan est fait de péridotite qui s'est serpentinisée au contact de l'eau. On évaluerait sa largeur à environ 200 km (400 au maximum). Il n'y aurait pas eu de subduction océanique suivie de subduction continentale, mais directement cette dernière.
A suivre...



Les Alpes françaises dans l'espace


Les terrains sont différents selon une coupe allant du plus interne au niveau de la collision à la périphérie, sur la carte ci-contre ces unités sont repérées par des couleurs différentes :

Zone interne

 - Les terrains qui viennent de l'autre continent, le Gondwana (ou de façon plus imagée : l'Afrique), en blanc hachuré, ils ont été charriés puis coupés de leur racine par l'érosion, c'est la nappe de la Dent Blanche et le Cervin.

 - L'ancien océan (Liguro-piémontais) et sa marge ouest (Piémontais), en vert, où l'on retrouve de la croûte océanique, les ophiolites mélangés aux anciens sédiments marins, les schistes lustrés. Ceci en unités charriées les unes sur les autres et repliées.

 - Les massifs cristallins internes, en violet. Ce sont des empilements d'unités tectoniques qui ont été entraînées dans la subduction plus ou moins profondément. Pour Dora Mira, la plupart de ces unités ont été subduites vers 40 à 50 km, une jusqu'à 100 km. Le pic de pression donc de profondeur atteinte a eu lieu à l'Eocène (vers 45-40 Ma).

 - Les nappes de flysch, en bleu foncé. Elles sont issues des zones les plus internes, ont dépassé les futures zones Piémontaise, Briançonnaise et Subbriançonnaise avant que ces dernières soient structurées au tout début de la collision. La partie supérieure est le flysch à Helminthoïdes qui comporte des traces énigmatiques, sortes de pistes contournées appelées Helminthoïdes.

 - Les zones Briançonnaise et Subbriançonnaise, en bleu clair. Des unités disposées en éventail, qui ont été décollées du socle. La ligne de chevauchement sur le Dauphinois est le Front pennique qui marque la limite entre les zones interne et externe.

carte agrandissable
carte générale des Alpes françaises
Carte structurale des Alpes Occidentales
Figure 22a de Visages des Alpes : structure et évolution géodynamique
de P. Agard et M. Lemoine. (simplifiée)


Zone Dauphinoise externe

Sur la carte le cristallin est en rose et le sédimentaire en blanc.
Elle comprend deux parties :
 - Les massifs cristallins externes: Mont-Blanc, Aiguilles rouges, Belledonne, Argentera. Le socle cristallin est remonté, les blocs sont poussés les uns contre les autres avec création de failles et de chevauchements, le sédimentaire entre les blocs est comprimé, plissé, faillé, une partie est éjectée par dessus-les blocs.
Ils comprennent une série de massifs d'altitude élevée (jusqu'à 4 000 m) et même le point culminant des Alpes au Mont Blanc (4 810 m), ce qui pose question, il est en effet étonnant que l'altitude moyenne des massifs cristallins externes soit plus élevée que celle des massifs internes.
 - Les massifs subalpins (non dessinés sur la carte) : Bornes, Bauges, Chartreuse, Vercors, Dévoluy. Ce sont des petits massifs d'altitude modeste, entre 1500 et 2000 m. Le socle n'affleure pas, la série secondaire et tertiaire est affectée de plis, parfois rompus par de grands décrochements et des chevauchements.

Avant-fosse

En jaune sur la carte. Bassins remplis de sédiments molassiques, produits de l'érosion. Ces formations sont discontinues et en général pas très épaisses (quelques centaines de mètres) sauf dans les bassins du Bas-Dauphiné et de Digne-Valensole (quelques milliers de mètres)

La figure ci-dessous montre les positions relatives au Jurassique des unités structurales et leur position actuelle.
A l'exception notable d'une unité de Dora-Maira, la marge occidentale de l'océan a été entraînée en subduction à des profondeurs moindres que les unités océaniques.
Entre le Jurassique et l'époque actuelle, la quantité de raccourcissement a été considérable surtout dans les unités internes, sans parler de toute la partie océanique (dont on ne connaît pas exactement la largeur, environ 500 km) engloutie dans la subduction.

carte générale des Alpes françaises
Position des anciennes unités paléogéographiques au sein de l'orogène actuel
Figure 45 du même ouvrage que la carte précédente.
Le point jaune situe la Matheysine.

Dans la page suivante nous verrons les transformations de la Matheysine prise dans l'orogenèse alpine.

Pour ceux qui veulent en savoir plus :
On peut conseiller deux ouvrages de vulgarisation, très clairs et bien illustrés :
 - pour l'histoire des Alpes, Le Cervin est-il africain ? de Michel Marthaler
 - pour les structures tectoniques, Ce que disent les pierres de Maurice Mattauer.
Les autres ouvrages sont plus ardus. Du fait de l'évolution importante des idées ces dernières dizaines d'années, il est souhaitable de consulter les ouvrages récents dont les explications, en introduisant les prismes d'accrétion rendent plus réalistes et crédibles les grands bouleversements de terrain générés par la collision. On peut conseiller :
 - Convergence lithosphérique , S. Lallemand, P. Huchon, L. Jolivet, G. Prouteau, Vuibert, 2004.
 - De l'océan à la chaîne de montagnes, tectonique de plaques dans les Alpes, M. Lemoine, P-Ch. de Graciansky, P. Tricart, Coll. Géosciences, Soc.géol. de France, 2000.
 - Visages des Alpes : structure et évolution géodynamique, Ph. Agard et M. Lemoine, Gordon et Breach, 2003.

Les développements récents : Agence Nationale de la Recherche - ERD-Alps « Erosion et développement des reliefs dans les Alpes occidentales », coordonné par P. Van der Beek. En particulier la tâche 3 : « Développement des reliefs sur le long terme » coordonnée par P. Tricart et S. Guillot.
- Thèse de Sébastien Jourdan (2012) « Reconstitution de la morphogénèse Oligocène-Miocène des Alpes occidentales par une approche pluridisciplinaire ».
- Conférence S. Guillot à l'UIAD : «Evolution du relief des Alpes».
- conférences T. Dumont à l'UIAD sur le Dévoluy et l'histoire des bassins avant-chaîne.
- ANDRÉ MICHARD, Cretaceous folding in the Dévoluy mountains, Bull. Soc. géol. Fr., 2010, t. 181, no 6, pp. 575-591

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