Chion-Ducollet et
   La Mure - 1880 à 1914
- Introduction
- Débuts en politique
- La conquête du pouvoir
- Maire de 1886 à 1912
- 25 ans de construction
- Les finances
- Mine et Municipalité
- CD et Dr Tagnard
- Maire et Curé
- CD et le Père Eymard
- Maire et Conseil
- Voyages à Paris
- Les procès
- Les autres mandats
- Fêtes
- Villa
- Après la défaite de 1912
- Conclusion
Annexes
- Déroulement de l'étude
- Idées reçues
- Industries en 1840
- Chansons et poèmes
- La Mure en 1900
- Armoiries de La Mure


1884-86, à la conquête du pouvoir


Pourquoi nos chroniqueurs ont-ils totalement occulté cette période ou rapporté des faits totalement faux ? Même Victor Miard nous induit en erreur, il écrit : "En 1883 [...] les divergences politiques et les passions partisanes dressèrent CHIONARDS contre FICELARDS. Ces derniers étaient les fidèles du docteur Tagnard".
Un dossier des ADI (cote 16M153) nous révèle des documents précieux, venant de la Préfecture, qui permettent d'écrire cette page inédite et de se faire une idée de l'action de Chion-Ducollet dans cette période intermédiaire entre adjoint démissionnaire et maire. Le docteur Tagnard n'était pas un adversaire, au contraire il s'est rangé au côté de Chion-Ducollet et était sur la liste élue en 1886 et à voté, au premier conseil, pour le maire et son programme (on peut donc dire qu'il a été, peut-être "à l'insu de son plein gré", un des premiers Chionard !). Ce n'est qu'en 1887, du fait de leur concurrence à l'élection des conseillers généraux, que le docteur Tagnard, reniant ses votes antérieurs va rejoindre ses anciens amis et devenir un opposant systématique.
Le Conseil élu en 1884, manipulé de l'extérieur par Chion-Ducollet, ne pourra aller à son terme.

Les élections municipales des 4 et 11 mai 1884

Ce sont les premières élections qui prévoient un mandat de 4 ans. Chion-Ducollet n'est pas candidat, il pense peut-être que la situation n'est pas suffisamment mûre et qu'il a besoin de temps pour agrandir son équipe.
Le premier conseil a lieu le 18 mai, le docteur Tagnard est élu maire par 17 voix sur 22, il remercie l'assemblée mais « déclare ne pouvoir accepter » sans donner de raison particulière (a-t-il pris conscience qu'il n'a pas été un bon maire dans le mandat précédent sans aucune réalisation et que ce nouveau mandat s'annonce difficile ?)
Un nouveau vote désigne Ferdinand Pelloux par 15 voix/22, maire éphémère qui envoie sa démission le 29 mai : "ma santé s'altérant de jour en jour..."

Eugène Robequain

Le 4 juillet, E. Robequain est élu maire par 10 voix sur 14 votants (3 voix pour Chion-Ducollet !). Peu de voix et peu de votants car le conseil est déjà scindé en deux, E. Robequain est ou va devenir un fidèle de Chion-Ducollet. Le premier adjoint Emile Besson et le deuxième adjoint Emmanuel Prost sont du même bord.
Le 25 juillet, l'ordre du jour prévoit l'étude du cahier des charges du collège. 12 conseillers présent et 9 absents sans motif. Au moment du vote pour décider si l'on fait 1 ou 3 lots deux conseillers s'en vont, la séance est levée, le quorum n'est plus atteint.
Le 30 juillet le cahier des charges est adopté avec 12 présents (8 absents sans motif).
En août deux conseils ne peuvent se tenir par manque de participants.
Le 8 septembre, un vote refuse l'augmentation de 11 centimes additionnels qui sont nécessaires pour l'acceptation du prêt pour le collège.
Trois conseils, sans sujet polémique, se tiennent normalement mais ceux du 30 décembre (5 présents) et du 6 janvier 1885 (8 présents) ne peuvent se tenir.
Le 10 février 85 On revient sur les 11 centimes additionnels pour l'emprunt du collège, le vote précédent est annulé au grand mécontentement de certains conseillers et les centimes finalement votés par 12 pour, 7 contre.
Le conseil du 12 mai est annulé par manque de participants.

En mai , un coup de théâtre, 8 conseillers du clan opposé au maire démissionnent, ce qui va obliger à une élection partielle car il manque plus d'un quart de participants.
Les lettres de démissions, quelque peu édulcorées, laissent toutefois ressortir le profond malaise : "pour des motifs de santé et autres que je n'ai pas à expliquer", "en présence du mépris dont je viens de faire l'objet de la part de mes collègues puisqu'ils ne m'ont pas jugé digne de faire partie d'aucune commission", "la construction du nouveau collège"...
Les élections ont lieu le 21 juin, 6 des démissionnaires sont réélus avec 2 nouveaux.

Le 7 juillet , en début de conseil, on procède à l'installation des nouveaux élus, puis "aussitôt après l'installation, Mr le Maire a donné lecture des questions à l'ordre du jour [...] une vive discussion ayant ensuite amené des questions personnelles, Mr le Maire a été obligé de lever la séance." Les nouvelles forces en présence font que le maire et ses deux adjoints présentent leur démission au préfet le 12 septembre :"L'administration municipale vient d'apprendre par les journaux qu'elle ne peut plus compter sur la majorité du conseil s'empresse de vous adresser sa démission collective". Ils restent conseillers.


Jean-Pierre Combe maire d'un conseil complètement bloqué

Le 1eroctobre, c'est Jean-Pierre Combe qui est élu maire par 11 voix sur 18. Celui-ci, un fort opposant à tous les projets qu'avait initiés Chion-Ducollet. Au conseil suivant le 25 octobre on annule la délibération du 10 février sur les 11 centimes additionnels, le collège et l'école de garçons ne seront pas reconstruits mais réparés.
Le 13 décembre, on reparle de l'école de filles et du cours supérieur, 12 voix pour et 3 contre en faveur d'une construction mais avec plusieurs attendus... Un petit problème : "Les plans et devis de cette construction sont devenus introuvables malgré toutes les recherches possibles faites à la Préfecture et au ministère de l'instruction publique."

Le climat devient de plus en plus détestable entre les deux fractions quasi égales : 12 conseillers dont le Maire qui ont repris la majorité dans la ligne des conseils précédents et 10 pour les opposants qui défendent le programme de Chion-Ducollet, celui-ci est, hors municipalité, leur maître à penser. Une énorme surprise, le docteur Tagnard se range dans de ce groupe tout en restant parfois à part. Ce Ce groupe, légèrement minoritaires, a un pouvoir de nuisance car s'il est absent toute décision est impossible par manque de quorum.
Le 8 juillet, le maire dans une lettre au préfet demande de démettre de leur fonction les 10 minoritaires pour 4 absences successives, ensuite le reste du conseil démissionnera, ce qui permettra de renouveller la municipalité par de nouvelles élections.
Le 12 juillet,, une nouvelle lettre, le maire confirme sa demande et rajoute un dernier fait :

Il parait que ces Messieurs abandonnent complètement les intérêts de leur pays et cherchent à pourrir les choses encore plus loin, et à ce propos je viens me plaindre près de vous, Monsieur le Préfet, de ce qu'ils ont voulu contrarier le banquet qu'on fait ordinairement chaque année le jour de la fête nationale du 14 juillet, en organisant aussi de leur côté un autre banquet, faisant passer à domicile pour avoir des adhésions et les séparer du banquet de la municipalité.

Il réécrit le 16 juillet :

A l'occasion de la fête nationale du 14 juillet, Messieurs les professeurs du collège se sont rendus à leur banquer, et le bruit court en ville que c'est par ordre de l'Académie, ce qui nous porte à le croire c'est que ni monsieur l'Inspecteur, ni aucun de MM les instituteurs ne sont venus au banquet officiel...

Le maire et sa majorité subissent un sérieux revers, le 1er août, lors de l'élection du conseiller d'arrondissement, le conseiller sortant, Augustin Pelloux, candidat de la municipalité est battu par Eugène Robequain présenté par la minorité, jusqu'alors il n'y avait qu'un candidat. (Arrondissement = sous-préfecture).

Une quatrième lettre le 3 août, il rappelle sa première lettre qui demande au préfet de prendre une décision.

Le 1erseptembre il y a un conseil, ce sera le dernier, il n'y a plus de nouvelles convocations.

le 9 novembre au préfet une pétition dénonçant les votes en l'absence du quorum de la municipalité contraires à la loi, elle est signée par 300 Murois, elle est "certifiée sincère et véritable" par le notaire Chion-Ducollet qui l'a signée en sixième position, (le nom d'André Tagnard n'apparaît pas). Cette pétition se termine par "Démission ou dissolution".
Cette pétition nous apprend que l'opposition est structurée dans le Parti Républicain Progressiste qui semble penser avoir l'assentiment d'une majorité de Murois suite à l'élection de leur candidat comme conseiller d'arrondissement contre le candidat officiel. Le style, les arguments juridiques, la critique des adversaires, les grands principes montrent que Chion-Ducollet a pris la plus grande part dans la rédaction.

Le 11 novembre, les 10 minoritaires envoie au préfet une démission conditionnelle : par suite du blocage du conseil "les soussignés déclarent donner leur démission, mais à la condition expresse que tous leurs collègues en feront autant de façon que le conseil soit intégralement renouvelé. Pour le cas improbable où cette démission complète ne serait pas donnée, la présente deviendrait nulle et de nul effet.

Le 22 novembre les conseillers de la majorité démissionnent


Le préfet dissout le conseil municipal

Le 24 novembre le préfet prend sa décision :
"Vu les démissions des vingt trois membres composant le conseil municipal de La Mure, il y a lieu de procéder à une élection générale le 12 décembre"

En 1886, Chion-Ducollet n'a pas uniquement oeuvré en sous-main, il a aussi manifesté son ambition et expliqué ses convictions pour revitaliser La Mure dans des publications :
- dans le Républicain de l'Isère du 1er et 2 mai sur les "Contingents des Chemins".
- dans le Petit Dauphinois des 27 juin, 5 et 13 juillet et 16 août sur le "Budget communal expliqué, exercice 1886".
- une brochure Étude financière et économique sur le collège communal de La Mure

[cette] dernière partie, qui, certainement, ne sera pas la moins intéressante, surtout en raison des énormités calculées et des erreurs volontaires répandues dans le public contre notre cher collège et ses amis les plus sincères, par des gens malintentionnés au suprême degré, que nous qualifierons d'ennemis acharnés du progrès social et de partisans dévoués du grand système de l'éteignoir.

Il faut noter qu'il a beaucoup développé son étude de notaire. Victor Miard écrit : sa valeur professionnelle, les consultations désintéressées qu'il prodigue, le rendent bien vite populaire .

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