Chion-Ducollet et
   La Mure - 1880 à 1914
- Introduction
- Débuts en politique
- La conquête du pouvoir
- Maire de 1886 à 1912
- 25 ans de construction
- Les finances
- Mine et Municipalité
- CD et Dr Tagnard
- Maire et Curé
- CD et le Père Eymard
- Maire et Conseil
- Voyages à Paris
- Les procès
- Les autres mandats
- Fêtes
- Villa
- Après la défaite de 1912
- Conclusion
Annexes
- Déroulement de l'étude
- Idées reçues
- Industries en 1840
- Chansons et poèmes
- La Mure en 1900
- Armoiries de La Mure



Idées reçues, exagérations, périodes occultées, mauvaises analyses...



Après avoir étudié les documents originaux de cette importante période de développement de La Mure on est amené à s'interroger sur la narration que nous ont laissée les différents chroniqueurs (il est difficile de les appeler historiens). Pourquoi toutes ces idées reçues, ces erreurs, ces blancs, ces approximations, ces coquilles, ces anachronismes, tout ceci repris jusqu'aux derniers écrits actuels, chacun d'eux rajoutant de nouvelles fausses interprétations ?
Légèreté ou mauvaise foi ? pour les premiers témoignages on peut supposer un reste de l'esprit partisan qui régnait à cette époque mais c'est difficile à invoquer quelques dizaines d'années après les événements. A-t'on considéré ces premiers écrits comme étant de référence, avec la facilité de copier plutôt que de rechercher les documents originaux, bien que ceux-ci étaient le plus souvent faciles à obtenir ?


I. Les écrits locaux

Nous allons répertorier ces inexactitudes sans trop développer, nous l'avons fait dans les différents chapitres avec de nombreux justificatifs.

« En 1883, alors qu'adjoint au maire son projet de collège pour les jeunes filles s'était heurté à l'opposition de la majorité du conseil municipal, les divergences politiques et les passions partisanes dressèrent "chionards" contre "ficelards". Ces derniers étaient les fidèles du docteur Tagnard » Victor Miard p. 231.
Cette phrase appelle de nombreuses remarques :
  - Nous avons relativisé la démission de Chion-Ducollet de son poste d'adjoint, il avait obtenu satisfaction sur le principal, notamment la création d'un cours secondaire pour jeunes filles (immédiatement mis en place), on lui avait refusé seulement un bâtiment spécial pour cet enseignement, il faut remarquer que maire il ne réalisera ce voeu qu'après 20 ans lorsqu'il aura l'opportunité d'acheter le château. Il démissionne probablement parce qu'il estime impossible de réaliser son programme en tant qu'adjoint dans un conseil divisé dirigé par un maire velléitaire et dans un contexte de mauvaise gestion financière.
  - Il lui faut être maire. Toute la période de prise de pouvoir est totalement occultée, elle est pourtant fort intéressante. Avec l'aide de la moitié du conseil qui a reconnu en lui un leader, il va arriver à faire dissoudre prématurément le conseil municipal en novembre 1886 par le préfet alors que le mandat devait durer jusqu'en mai 1888.
  - Pourquoi a-t'on caché ce qui, aujourd'hui, est un véritable scoop : dans ce chemin vers le pouvoir, le docteur Tagnard a été un allié et sera sur la liste pour l'élection de décembre 1886, il est même devant Chion-Ducollet ! L'opposition entre eux débutera en fin 1887 lors de l'élection pour le Conseil général où ils sont tous deux candidats. Personne n'a osé écrire que le docteur Tagnard a été un des premiers chionard, probablement par opportunisme ou à son corps défendant.

La Mure divisée entre Chionards et Ficelards
Pour la première élection sans opposition en 1886, le docteur Tagnard est colistier de Chion-Ducollet ce qui a dû contribuer au succès de la liste. Chionards et Ficelards ne peuvent apparaître qu'en fin de 1887 à l'occasion des élections cantonales.
Où est l'opposition en 1888, 1896, 1900, 1908 ? Elle ne présente pas de liste ! Plutôt que deux blocs on imagine deux minorités qui savent être bruyantes dans certaines occasions et une majorité silencieuse qui vote selon ses intérêts et qui va faire confiance pendant 25 ans à Chion-Ducollet puisqu'il agit et améliore les conditions de vie des habitants.

Le méchant maire contre le bon curé
On a vu que c'est le curé Morel qui ouvre les hostilités en refusant de reconnaître le résultat des élections. C'est lui qui mènera constamment le jeu, le tort de Chion-Ducollet est de répondre du tac au tac au lieu de prendre un peu de recul. Le maire a peur des réactions du curé mais ses tentatives de normalisation se heurtent au cléricalisme de l'évêché (voir la pollution des cimetières...). Le changement d'évêque amènera le calme et une collaboration efficace pour sauver l'ancienne église.

La vieille église raccourcie à cause du passage du train
Assertion absolument étonnante, reprise jusqu'à nos jours : il suffisait de lire les comptes-rendus de 1902, largement diffusés, pour avoir la bonne version. Lorsque l'église, qui devait être démolie, a été in extremis raccourcie, le train n'était encore qu'un vague projet.

Le sacerdoce du bon docteur Tagnard, médecin des pauvres
Le docteur Tagnard que l'on a vu médiocre politique, mais certainement brave homme et médecin dévoué, exerçait la charge de médecin des pauvres, ce n'était pas du bénévolat mais une fonction officielle plutôt bien rétribuée (3 fois le salaire moyen). Les pauvres, recensés par la mairie avaient droit à la médecine gratuite (la CMU de l'époque).

Les bordures de trottoir de la route nationale faites en 1924
En 1903, Chion-Ducollet passe un accord avec le gouvernement pour mettre des bordures aux trottoirs de la rue du Nord à la rue des Alpes le long de la route nationale. La dépense est moitié pour l'Etat, moitié pour la ville qui peut en faire payer une partie par les riverains. Ceci est fait en 1904 mais une coquille d'un chroniqueur (P. Berthier ?) fait écrire 1924. Date reprise imperturbablement par tous jusqu'à aujourd'hui !

II. Patrimoine en Isère 

Cet organisme a inventé un contexte inédit
  - « Son architecture (de l'hôtel de ville) reflète plus que tout autre bâtiment de la ville la prospérité économique locale due à l'exploitation de la mine. » Patrimoine en Isère, 2006, p. 85.
Nous avons consacré un chapitre à cette étonnante interprétation.

  - « L'édifice s'oppose en tous points à l'église rebâtie à la même époque. Effectivement Alfred Chion-Ducollet est plus qu'imprégné des valeurs laïques de la République, un franc-maçon anticlérical déterminé.
  -Il opta de ce fait pour un édifice érigé en pierres de taille extraites des carrières de Laffrey et Versenat en opposition logique au matériau choisi pour la nouvelle église : le ciment de l'entreprise Pelloux.
  - De plus, l'allure de l'ensemble, emblème de la modernité laïque et civique, devait formellement contraster avec l'esprit romano-gothique de cette église par un caractère néoclassique, symbole et affirmation des valeurs républicaines.»
(Patrimoine en Isère, Hôtel de ville de La Mure, par Thibault Gléréan, chargé de mission inventaire.)

Une psychologie de comptoir, les documents originaux ne contiennent aucun mot justifiant cette position. De plus de nombreuses erreurs ou approximations (les parties soulignées par nous) montant une méconnaissance totale du sujet.

L'ennui est que ce que dit cet organisme est forcément la référence, d'où le nombre de sites qui reprennent ces mauvaises interprétations : Wikipedia, La Mure, Valmonthey...

Exemples de sites (La Mure et Valmonthey) copiant le Patrimoine en Isère, les surcharges sont rajoutées sur les points litigieux.




III. Petite histoire du nom de nos rues 

Ce paragraphe est difficile à écrire car il amène à critiquer un récent travail de confrères. Mais, malheureusement, ce travail collectif relève de la situation décrite plus haut, on n'a pas consulté les documents originaux mais ce qui avait été rapporté par les chroniqueurs précédents, on se retrouve avec l'addition des erreurs et idées reçues.
De plus on trouve deux scoops étonnants :
- On a inversé les plaques de la rue des Jardins et de la rue Saint-Jean, alors que la rue des Jardins a été baptisée en 1843 et que la rue saint Jean n'existait pas encore !
- Le nom de la place Auguste Perret est attribuée à un soldat mort en 1914 alors que la place a été construite en 1911 et baptisée dès 1903 !

Récapitulatif sans hiérarchie entre les simples observations et les grosses inexactitudes (attention, ceci ne concerne que les quelques rues en rapport avec notre étude) :
- p. 21 Breuil : les trottoirs en 1924.
- p. 26 Capucins : On démolit en 1889 (et non en 1868) les bâtiments sauf la chapelle, on construit (et non on transforme) la nouvelle école. Le déplacement du marché des vaches et des boeufs n'a rien à voir avec les trottoirs du Breuil !
- p. 32 Chion-Ducollet : le Rondeau en 1888. Il est dénommé sur le cadastre de 1883 ; le rond... d'eau ? veut-on dire qu'il y avait un bassin ? c'était avant 1886 un dépotoir.
- p. 38 Croix-blanche et p. 60 Jonche : ces deux rues continuent d'exister sur la place Perret tout au moins pour la poste !
- p. 40 Paul Décard était le clerc principal de Chion-Ducollet quand celui-ci, après avoir été élu député en 1906, quitte son étude. Paul Décard le remplace. Il est maire en 1919 et donnera en 1924 le nom d'avenue Chion-Ducollet à une partie des fossés et au cours du Rondeau.
- p. 46 Eymard : la vieille église et le train.
- p. 47 la photo ne peut pas dater de 1906 mais d'avant 1902 puisque l'église est encore complète.
- p. 57 Jardins et p. 89 Saint-Jean : voir ci-dessus.
- p.61 César Joubert, un adjoint qui a fait tous les mandats de Chion-Ducollet de 1886 à 1912 et non de 1912 à 1920 comme on peut aussi le voir sur Berthier.
- p. 63 Liberté, l'hôtel de ville en pierre Versenat, ce qui est bien réducteur.
- p. 75 Octroi : a t-il été créé par Pierre Noé Genevoix en 1800 en remplacement du treizain ? (V. Miard p. 183 qui se contredit dans la note de bas de page p. 215 en l'attribuant à Jean-François Lesbos maire de 1826 à 1835).
- p. 80 Perret Auguste : voir ci-dessus.
- p. 92 Tagnard : le bon docteur qui soigne gratuitement.

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