Disons tout de suite que les difficultés et les procès sont inhérents aux grandes entreprises, aux grands travaux,
à la possession d'immeubles, aux successions recueillies, à toute organisation de voirie, de règlements
sanitaires, d'hygiène, et de régie d'octroi et autres taxes communales. En un mot, l'organisation d'une Ville,
la restauration de ses finances, ne peuvent aller sans difficultés, sans heurts ! Le vieux proverbe est
toujours vrai : "qui a terre a guerre".
Chion-Ducollet dans "bilan de la municipalité de 1886 à 1912"
Pour la construction du collège, alors que le devis du lot affecté à François Pradourat se montait à 190 000 F,
il présente une facture de 250 000 F alors que l'on a vu que le travail n'a pas été effectué avec la
qualité demandée. Le décompte de l'architecte "homme compétent et consciencieux" s'élève à 181 081,71 F.
Evidemment le Maire n'accepte pas cet énorme dépassement injustifié et l'entrepreneur assigne la ville.
Pradourat ne répond pas au courriers mais il écrit beaucoup, au préfet,
au ministre, Chion-Ducollet
est "méchant, vindicatif, pas républicain, haineux..." ce qui déclanche des cascades de courrier.
Ayez l'obligeance Monsieur le Ministre de faire ordonner une enquête sur les agissements par trop arbitraire du Maire de la petite ville de La Mure qui quoique républicaine de vieille date pourrait bien embrasser le boulangisme si la tyrannie de son maire devait continuer.
En 1890, Chion-Ducollet reçoit une lettre anonyme qu'il annote "auteur présumé Pradourat lui-même". Dans ses lettres Pradourat ne traite pas le fond du problème mais agite des considérations générales et politiques. Des experts sont nommés qui donneront finalement raison à la municipalité :
Après une pénible expertise et plaidoiries, le Conseil de Préfecture accorda à l'entrepreneur 182 481,71 F.
Ce pénible procès en défense valut à la ville les 70 000 francs environ demandés en sus de ce qui était dû et largement payé.
NOTA. M. Pradourat devint un ennemi de la Municipalité, naturellement !
Cette deuxième construction a aussi donné lieu à un procès qui a nourri l'ambiance détestable du moment
car l'opposition a pris parti et encouragé le plaignant.
Lors de la démolition d'une maison on constate que le mur mitoyen avec la maison Perrier, non concernée
par les expropriations, est vermoulu et ne pourrait tenir debout. Un arrangement est négocié
(5 000 F pour une valeur estimée à 3 000 F). Poussé par l'opposition, M. Perrier se rétracte, réclame 10 000 F
et assigne la commune. Le tribunal ordonne la reconstruction du mur mitoyen, à frais communs, les frais du
procès devant être partagés. M. Perrier dut contracter un emprunt et hypothéquer la maison qui après sa mort
a été vendue 2 400 F.
Commentaire de Chion-Ducollet :
Et voilà les conséquences des mauvais conseils d'aigrefins, ne rêvant que méchancetés contre ceux qui les gênent, au risque de ruiner ceux qui ont la faiblesse de les écouter, et quand arrive le moment de payer, comme toujours ils s'éclipsent, satisfaits d'avoir assouvi leurs mauvais instincts.
La facture de l'entrepreneur Edouard Andrieux dépasse de 7 000 francs le devis, la raison invoquée étant la qualité
du calcaire de Laffrey qui devait être exempt de veines de calcite. La défense de Chion-Ducollet est d'affirmer
que cette exigence, non écrite dans le cahier des charges, avait été faite et acceptée lors de la visite des
carrières de Versenat et Susville, par lui-même accompagné de l'architecte, de l'entrepreneur et du conducteur
des travaux. "Cette condition fut acceptée sans difficulté, comme une chose toute naturelle, consentie d'avance,
puisque la réputation de la pierre de choix ne comportait pas ces débits cristallisés.
M. Andrieux assigne la Ville devant le Conseil de Préfecture. Après expertise, le tribunal accorda
seulement 2 400 francs
à l'entrepreneur et le condamna aux 2/3 des frais.
Commentaire de Chion-Ducollet :
M. Andrieux est devenu un adversaire irréductible du Maire Chion-Ducollet
Nous avons parlé dans la page
Maire et Curé des deux procès, dont celui dit des "robes blanches", avec l'abbé Morel qui contestait les procès verbaux de la municipalité. Procès qui iront jusqu'en cassation et que le curé perdra.
Un troisième procès cette fois contre le clergé diocésain suite à l'affaire dite des "Robes Noires".
Ce procès, inutile et plutôt ridicule comme les précédents, est cette fois réclamé par Chion-Ducollet. Les faits : le 12 août 1895, un groupe de pélerins de Voiron, de retour d'un pèlerinage à la Salette descendent de voiture à l'entrée de La Mure et traversent la ville pour rejoindre la gare en chantant. C'est un jour de marché et il s'en suit un léger désordre avec les inévitables échanges de quolibets avec certains habitants.
Il semble que cette petite provocation n'était pas réservée à La Mure puisque les mêmes évènements avaient eu lieu au départ en traversant Voiron, sans réaction des autorités. Chion-Ducollet en fait une affaire d'importance, ameute les autorités et le 4 novembre a lieu un procès contre les deux vicaires de Voiron pour "tapage injurieux" et contre un pélerin pour "tapage injurieux et violences légères".
Nous donnons en documents joints deux relations bien différentes de cette affaire :
- par
Chion-Ducollet dans le bilan de la municipalité de 1886 à 1912.
- par le journal
La Croix de l'Isère dans un supplément de 4 pages du 10 novembre 1895 qui fait ressortir l'aspect cocasse du procès.
Avec la Gare
La gare est suspectée de tricheries sur l'octroi, un procès-verbal est déposé, le 17 mars 1903, pour déchargement
de fers et enlèvement sans déclaration préalable. Ces fers étaient indiqués à destination de Prunières et une faible
quantité pour La Mure, alors que la totalité était restée en ville. Le tribunal correctionnel, puis la Cour de Grenoble
en appel (2 ans après !) donnent raison à l'octroi.
Procès Bonnois dit du "Verrat"
Un procès-verbal est dressé contre M. Bonnois, charcutier, le 14 mars 1904, pour déclaration inexacte du
poids d'un porc. Il fallut aller devant le Tribunal correctionnel qui débouta M. Bonnois et le condamna à une
amende de 125 francs, à la valeur du porc confisqué et aux dépens.
Plusieurs procès contre Henri Pelloux,
Avec des habitants de Ser Sigaud
Les travaux de recherche et de prélèvement de l'eau a créé des dommages, 10 habitants de Pierre-Châtel, Ser Sigaud
et Pérouzat se regroupent en syndicat et intentent un procès avec demande de dommages et intérêts, en 1903.
Les demandeurs sont déboutés pour vice de forme, un syndicat de plaideurs étant illégal.
En 1906, neuf de ces demandeurs intentent séparément un procès avec des demandes d'indemnités importantes. Ces
neuf procès vont traîner en longueur puisqu'ils ne seront terminés qu'après le départ de Chion-Ducollet. Les
plaignants seront déboutés par suite de la loi du 8 avril 1898 sur le régime des eaux.
Le principal conseil des plaideurs était Joseph Pellat, géomètre à La Mure, fils de l'ex-secrétaire de mairie,
+ Lucien Pellat, qui avait démissionné dès l'élection de Chion-Ducollet.
Avec M. Ros
M. Aman, ancien propriétaire de la demeure de M. Ros, avait cédé la source de Pré Baccard à la Ville, ce qui
lui avait donné droit "à un demi-pouce fontainier". M. Ros avait profité de ce droit après l'achat de la maison.
La source de Pré Baccard (80 litre/minute en 1901) est abandonnée du fait des nouveaux apports , M.Ros assigne
la Ville, en 1904, il veut conserver son droit (mal établi) sur l'eau de la source et ne veut pas
en compensation de l'eau de
Chion-Ducollet !
Il est débouté par jugement du 20 février 1908.
Procès Tardy
L'entrepreneur M. Tardy, présente une facture dépassant les prévions de 29 000 francs que Chion-Ducollet
refuse de payer. M. Tardy assigne la ville.
Après une expertise et de longs débats, des jugements contradictoires, le Conseil de Préfecture réduit
le décompte de 21 000 francs.
Procès Sauzières
Un procès est fait à l'architecte, on lui reproche des tolérances "vraiment abusives" vis à vis de
l'entrepreneur : non respect du dosage du ciment (400 kg au lieu de 800 inscrits dans le cahier des
charges), non respect d'accords sur les facturations. Le conseil de Préfecture déclare finalement que
l'architecte a procédé de façon régulière et n'a pas commis de faute. Le conseil municipal s'est pourvu
au Conseil d'état. Chion Ducollet en fait une question de principe. Le résultat du pourvoi favorable à
Sauzières tombera en 1912 après la chute de Chion Ducollet.
En 1904, des travaux d'assainissement sont décidés dans la rue Pierre Grosse (rue Colonel Escallon) avec réfection du pavé avec des cailloux étêtés, posés sur du béton. Plusieurs escaliers empiètent sur la rue. Les propriétaires sont invités à les démolir, tous le font sans problème sauf deux MM. Ros et Arnaud, adversaires politiques du Maire. Cette affaire va durer deux ans. Chion-Ducollet ne lâche pas malgrè des jugements de simple police favorables aux prévenus et la force d'inertie suite au jugements suivants de cassation. C'est finalement la force publique qui détruira l'escalier de M. Ros. M. Arnaud exécute le jugement et fait démolir son escalier.