La cavalcade de 1909 devant l'Hôtel de ville.
Le 14 juillet, haut symbole républicain, est fêté traditionnellement, on trouve sur le registre des délibérations le compte rendu d'un de ces anniversaires :
Cette fête a été fort belle. Le soleil s'est mis de la partie dès l'aube et a dispersé les nuages de la veille.
Le banquet qui a eu lieu sous les arbres des Capucins, n'a rien laissé à désirer ; le nombre des convives a dépassé le chiffre de cent.
Dans son discours improvisé, M. le Maire s'est attaché aux faits historiques touchant La Mure en 1789. Il a rappelé les noms des officiers municipaux de cette époque, leurs sentiments généreux et dévoués qui attestent de leur haute valeur.
La fanfare municipale a donné deux concerts : l'un au banquet des Capucins et l'autre place des Casernes, l'un et l'autre fort appréciés.
Le bataillon scolaire a exécuté quelques exercices sur la place des Capucins, à la satisfaction générale.
Les habitants ont largement répondu à l'appel de la Municipalité en pavoisant leurs maisons.
La fête a été terminée par un superbe feu d'artifice tiré sur la place de la Liberté.
Aucun incident ne s'est produit dans cette belle journée qui nous a rappelé à tous le 14 juillet 1789.
L'inauguration a été organisée le 24 juillet à la suite du centenaire de la révolution de Vizille présidée
par Sadi Carnot.
On trouve sur le registre des délibérations la transcription du
reportage du journal Le Petit Dauphinois.
Le train ministériel part de la gare de Grenoble à 8h35 avec à son bord M. Deluns-Montaud, ministre des travaux publics,
toutes les autorités départementales et de nombreux journalistes.
A Saint-Georges, on descend de voiture pour passer sur la nouvelle ligne que l'on doit inaugurer. M. Deluns-Montaud
monte dans un wagon découvert orné de drapeaux.
L'attention se partage entre l'aspect du pays et les innombrables travaux d'art qui se déroulent sous notre
route et au-dessus de nous. Le train s'arrête un instant pour permettre aux invités de sonder de l'oeil
l'effroyable hauteur de laquelle nous dominons la vallée du Drac. De ce point le coup d'oeil est vraiment
vertigineux...
Courte halte à La Motte les Bains, arrêt à La Motte d'Aveillans où toute la population de ce bourg et celle
des communes environnantes se pressent aux abords de la gare.
Le train arrive à La Mure à 11 h. Chion-Ducollet souhaite la bienvenue au ministre et le cortège s'ébranle
en direction du collège, fanfares, salves d'artillerie, acclamations de la foule, arc de triomphe, décorations, bouquets.
L'enthousiasme des Murois est indescriptible.
Au nouveau Lycée, à midi, M. le Ministre a reçu MM. les maires des communes voisines ainsi que les divers
fonctionnaires de la région.¨Parmi ces derniers on a remarqué l'empressement qu'avait mis M. l'Archiprêtre de La Mure
de présenter à M. le Ministre les membres du clergé.
La musique joue la Marseillaise. Il fait une chaleur accablante, M. Deluns-Montaud
qui a fait à pied tout le trajet du chemin de fer au collège, soit deux kilomètres sous un soleil sénégalien parait visiblement fatigué.
Le menu servi dans le futur dortoir
Discours improvisé de M. le Préfet, long discours de M. le Recteur, discours du ministre. Banquet de 150 couverts
suivi du
discours de Chion-Ducollet, de Louis Guillot, député, conseiller municipal, ami de Deluns-Montaud.
Discours du ministre : Il fait bien chaud et je suis bien fatigué. je n'en prend pas moins la parole
parce que vous en conviendrez il n'est pas banal de parler politique à 900 mètres au-dessus du niveau
de la mer. Juste trois fois la hauteur de la tour Effel ! (Rires et applaudissements unanimes.)
Mon ami Louis Guillot vous a dit que, grâce aux merveilles de la science, grâce à ce chemin de fer
étonnant et pittoresque que nous venons d'inaugurer, La Mure est maintenant en plaine...puis un long
développement à la gloire de la révolution et de la république.
A 4h, première pierre du Groupe scolaire de Pérouzat, discours de M. Rivet, député de l'Isère.
A 5 h le député et sa suite prennent le train de retour.
La fête continue à La Mure. Des feux de joie ont été allumés sur la montagne de Simon ainsi que sur
les collines de la Citadelle et de Peychaud à la tombée de la nuit. Les illuminations ont été superbes.
A neuf heures un superbe feu d'artifice tiré sur la place de la Liberté a dignement couronné cette journée
dont les Murois garderont un impérissable souvenir.
Arrivée du train inaugural à la gare de la Mure pavoisée.
Registre des délibérations le 23 mai
M. le Maire propose à l'assemblée de consigner sur le registre des délibérations le compte rendu de la
fête du 5 mai pour en perpétuer le souvenir et servir à l'histoire de La Mure. C'est grâce aux faits
consignés sur les registres de 1789 que nous pouvons aujourd'hui retracer l'histoire locale de cette
grande époque. Il faut de notre côté songer à ceux qui auront à célébrer en 1989 le deuxième centenaire
de la Grande Révolution.
A l'unanimité, l'assemblée adopte la proposition de M. le Maire et décide que le compte rendu par les Journaux
le Petit Dauphinois et le Réveil du Daupbiné sera transcrit ci-après.
La Mure
L'anniversaire de l'ouverture des Etats Généraux de 1789 a été célébré avec l'entrain qui caractérise à La
Mure les fêtes vraiment démocratiques.
Dès la veille les salves d'artillerie et une retraite aux flambeaux jetaient la note gaie dans la
ville entière.
Le lendemain, à l'aube, les édifices publics et la plupart des maisons particulières se recouvrent de drapeaux
et d'oriflammes aux couleurs nationales.
Seuls, quelques bonapartistes assez ignorants pour ne pas savoir que sans la révolution les Napoléon
n'eussent jamais été que de vulgaires Bonaparte ; quelques cléricaux endurcis et quelques mécontents
que la rage de l'impuissance étouffe se refuse à saluer l'aurore de cette liberté que nos pères de 89
ont scellé de leur sang. Plaignons-les.
A midi, un banquet fraternel, présidé par le Maire, assisté de son conseil à peu près au complet et de
la plupart des fonctionnaires, réunit plus de cent citoyens dans la grande salle de l'école de garçons.
M. Manoël, qui a fait ce diner, a justifié une fois de plus sa vieille réputation dans l'art culinaire ;
qu'il reçoive ici nos meilleurs compliments.
Au dessert, après l'exécution de la Marseillaise enlevée avec beaucoup de brio par l'Echo de la Matheysine,
M. le Maire prononce un discours dont voici à peu près la substance.
Après avoir signalé les causes qui nous réunissent dans ce banquet populaire, M. Chion-Ducollet prenant les
faits locaux, rappelle qu'il y a cent ans presque jour par jour, que, dans la salle où nous sommes assemblés
aujourd'hui, et qui était alors une église de capucins, avait eu lieu la bénédiction des drapeaux offerts
à la milice bourgeoise de La Mure, par M. Perrier seigneur de la terre.
L'honorable orateur fait ressortir le rôle joué en 1788 par les trois ordres du Dauphiné aux Etats de Vizille
et de Romans, et montre clairement que, dans ce mouvement populaire dont nul ne prévoyait encore les
conséquences, La Mure tint à l'honneur de se faire remarquer. Puis, rendant un hommage mérité à la
mémoire des hommes qui ont représenté La Mure à cette époque d'agitation. M. Chion-Ducollet rappelle
l'ouverture de ces Etats Généraux de 1789 représenté par plus de 1000 délégués des trois ordres dont 595 pour
le Tiers Etat. Il traite ensuite les principales questions qui furent débattues dès la réunion de cette
assemblée qui, grâce à l'énergique attitude du Tiers Etat, va bientôt prendre le nom d'Assemblée
nationale. Le Tiers Etat, fier de sa dignité, imbu des principes d'égalité dont il aspire déjà à
faire sa devise, refuse à l'ouverture des Etats Généraux, de comparaître à genoux devant le roy et
découvert devant les autres ordres, selon l'usage établi jusqu'alors. Les souvenirs du serment du jeu de
paume, de la chute de la Bastille, de la nuit du 4 août, sont évoqués ensuite brièvement. Parlant du
bas clergé de cette époque qui était malheureux et pressuré par les évêques et les cardinaux, l'orateur nous
le montre entraîné alors dans ce mouvement populaire que le bas clergé, aujourd'hui oublieux et ingrat,
conspue avec tant d'impudence et d'injustice. Puis, dans un parallèle élevé entre les héros de la Révolution
tombant sous la guillotine pour donner à leurs descendants la liberté et la justice, et le Christ mourant
courageusement sur une croix pour avoir osé affirmer le principe de l'égalité des hommes, M. Chion-Ducollet
soulève un véritable tonnerre d'applaudissements.
M. le Maire donne ensuite lecture de la déclaration des Droits de l'homme et du citoyen, qu'il appelle
l'évangile civil, et termine son discours en exprimant l'espoir que par la République qui nous a déjà
donné la Liberté et l'Egalité, nous verrons bientôt s'éteindre les querelles mesquines de parti et qu'en 1890,
lorsque l'on fêtera l'anniversaire de la fédération des communes, nous serons tous unis dans la Fraternité.
Après M. Chion-Ducollet, M. Caire, inspecteur primaire, porte au nom des fonctionnaires et en termes
chaleureux un toast très applaudi au Président Carnot, dont la famille tout entière est la personnification
de l'honneur, de l'intelligence, du travail et de la probité.
Chion-Ducollet a rapidement réagi à la possibilité d'installer un éclairage électrique
Les Murois vont le découvrir le samedi 30 janvier, quelques jours avant l'inauguration, lors des essais.
La nuit est obscure, à 20 h la ville s'est trouvée tout à coup et comme par enchantement brillamment éclairée, les habitants de la Mure se pressaient dans les rues, sur les places pour admirer l'éclairage nouveau.
Une grande fête a lieu le dimanche 7 février pour l'inauguration.
On peut lire les comptes rendus de la presse locale dans Mystères et curiosités de l'histoire de René Reymond, pp 57 à 61.
Registre des délibérations le 22 septembre
La fête du 22 septembre a été assurément l'une des plus belles qu'il nous ait été donné de voir à
La Mure depuis de longues années.
Depuis un mois les habitants des quartiers de la Murette, du Nord et du Calemard travaillaient
avec une activité extraordinaire à la confection de guirlandes de verdure pour décorer l'Hôtel de
Ville le jour de sa fête d'inauguration.
La veille superbe retraite aux flambeaux par la fanfare et les tambours des sapeurs pompiers. Le 21 à
la chute du jour et le 22 au matin dès l'aube, les vieux canons de La Mure, postés à la Citadelle,
annonçaient les réjouissances.
Le nouvel Hôtel de Ville est splendide : tous les ouvriers de la construction ont rivalisé de zêle
et de goût pour la décoration. Le grand escalier d'honneur fait l'admiration de tout le monde.
A onze heures M. le Maire et ses adjoints, suivis du Conseil Municipal, sont reçus au sommet de
l'escalier d'honneur par M. Besson architecte ; M. Montant conducteur ; M. Andrieux entrepreneur
du premier lot et plusieurs de ses collègues.
Le cortège fait le tour des salons du premier étage, puis il vient se placer sur le balcon qui fait
face à la rue du Nord.
La fanfare joue la Marseillaise, et les canons de la Citadelle se font à nouveau entendre, pendant
que M. Chion-Ducollet, maire, pose le drapeau de la Mairie sur le bord extérieur du balcon.
M. le Maire prend ensuite la parole et prononce un discours de circonstance que tous assistants peuvent
entendre très distinctement. Ce discours a été souligné par les nombreux applaudissements de la foule
massée sur la place de la Liberté.
A midi, la cérémonie de l'inauguration était terminée.
Un banquet ouvrier a immédiatement suivi. Il a eu lieu dans les deux superbes salons du premier
étage du nouvel édifice que M. le Maire a justement appelé "Le temple civil de la Société moderne."
Par son architecture et son élégance, ce monument fera dorénavent l'admiration des touristes qui
visitent chaque année La Mure et son chemin de fer.
On ne se souvient pas d'avoir vu un banquet aussi important : 230 convives réunis à la même table.
Le menu , bien composé a été admirablement servi par l'Hôtel du Nord.
Au dessert, M. Chion-Ducollet, maire, a prononcé un discours historique et patriotique sur les
événements des 20 et 22 septembre 1792. Il a été fréquemment interrompu par les applaudissements
unanimes des assistants.
Après ce discours, M. Marmonnier, de Grenoble, a demandé et obtenu la parole. L'orateur qui
s'exprime avec une rare facilité, lève son verre aux Républicains de La Mure et à M. Chion-Ducollet,
Maire de La Mure. Ce toast est fortement applaudi. M. Marmonnier ajoute qu'il est venu à La Mure
en son nom personnel d'abord et au nom de ses amis, pour apporter aux républicains murois les
félicitations et les encouragements des républicains de Grenoble. Les luttes extraordinaires,
exceptionnelles contre le cléricalisme sont l'objet d'une attention toute spéciale et plus que
sympathiques de leur coreligionnaires de Grenoble qui admirent la fermeté, les sentiments de
reconnaissance et le républicanisme de la majorité des habitants de cette vaillante petite cité
progressiste.
M. Marmonnier lève une deuxième fois son verre à M. Chion-Ducollet, ce maire qui a été vilipendé
de la façon la plus inqualifiable, la plus injuste, pour avoir osé mettre ses actes politiques et
administratifs en harmonie avec ses opinions, avec des programmes électoraux ; à M. Chion-Ducollet
le sincère républicain, l'administrateur véritablement dévoué que tout le monde connaît aujourd'hui.
Républicains de La Mure ! dit M. Marmonnier, vous vous êtes réunis sous un drapeau qui est le bon,
serrez-vous autour de lui, continuez à le défendre, car vous défendez la bonne cause, la cause
de la Liberté et de la République !
Les toasts de M. Mamonnier ont été couverts d'applaudissements frénétiques. L'orateur est entouré,
félicité et remercié des bonnes paroles qu'il vient de prononcer ; tous les convives viennent lui
serrer la main.
A 4 heures, après le banquet, un concert a été donné sur la place de l'Hôtel de Ville, par la fanfare
l'Echo de la Matheysine sous l'habile direction de M. Giraud. La musique est et sera toujours
l'âme des fêtes populaires ; on peut bien dire que sans musique il n'y a pas de fête possible, et qu'avec
elle l'enthousiasme s'épanouit promptement.
A 8 heures, un superbe feu d'artifice a été tiré sur la place de l'Hôtel de Ville, en présence d'une foule
que l'on peut évaluer sans exagération à plus de 3 000 personnes.
Les maisons étaient à peu pres toutes pavoisées et superbement illuminées. Noté en passant : l'Hôtel
de Ville, la poste, la demeure de MM. Chion-Ducollet, maire et Joubert 2e adjoint, le collège et les
bureaux du chemin de fer.
A 9 heures, dans la grande salle des Capucins , a eu lieu un bal populaire organisé par la municipalité
et par la fanfare. La salle était littéralement comble de danseurs et de curieux. Notez que plusieurs
octogénaires, hommes ou femmes, ont été remarqués dansant le rigodon. La danse n'a pris fin qu'à 4
heures du matin.
Les établissements publics avaient la permission de la nuit.
Ajoutons que pas le moindre accident ne s'est produit et que cette double et magnifique fête laissera
d'inoubliables souvenirs dans l'esprit des Murois qui aiment leur pays.
L'inauguration sur le registre des délibérations
Il organise une deuxième
inauguration de l'Hôtel de ville avec des autorités départementales.
Le procès-verbal de la fête d'inauguration
Est-ce le premier "campage" au Paradis ?
Le compte rendu, par le maire, dans le registre des délibérations
.
Favorisée par un temps splendide, cette fête a eu lieu dimanche et a pleinement réussi. Environ deux mille personnes sillonnaient la montagne. Le programme que nous avons publié a été ponctuellement suivi.
Mais le plus curieux de la fête a été, sans contredit, le repas de midi sur le gazon, sous l'ombre des pins. Des familles au grand complet étaient là, nombreuses et pleines de gaieté, de cette gaieté que rien ne commande et que rien ne peut arrêter ou assombrir. Chacun étale ses provisions sur cette immense table où quelques laborieuses fourmies viennent prendre part au festin champêtre. Le coup d'oeil était d'un effet saisissant et vraiment pittoresque.
De nombreux Grenoblois sont venus prendre part aux réjouissances muroises.
Vers 3 heures, les sociétés musicales qui avaient organisé sur place une cuisine improvisée, sont venues rejoindre le groupe principal installé au sommet de la montagne, sur le versant de La Mure, et ont donné quelques morceaux très applaudis. Ensuite tout le monde ou à peu près, s'est dirigé vers le ravissant plateau abrité qui porte le nom de "Paradis". Vraiment bien dénommé ce petit coin entouré de forêts de pins et de sapins, où l'on cueille les fraises à pleines mains.
Le grand concert a commencé vers quatre heures et a duré jusqu'à 6 heures. Le bal champêtre est venu aussitôt après et a été fort animé. On y a surtout dansé le vieux rigodon.
Les Grenoblois sont partis les premiers pour arriver au dernier train qui les a emportés vers la ville à 6 heures 27.
Les festoyeurs ont fait la descente tous ensemble à 7 heures par l'ancien sentier sur le versant de Prunières et ont rejoint le nouveau chemin au premier tournant en vue de La Mure.
Avec la diversité des costumes des dames, demoiselles et enfantes, on peut juger du coup d'oeil de ce superbe ruban humain à travers la montagne, sur une longueur d'un kilomètre au moins, par un chemin relativement étroit de 1m50 à 2 mètres.
La rentrée en ville s'est faite en cortège, fanfare et trompes en tête, pour les Murois ; Susville et Prunières ont également pris leur direction respective et en corps.
Le soir dans la salle des Capucins, le bal a été splendide. La fête n'a pris fin qu'à une heure du matin. Pas le moindre incident. La joie et la gaieté partout. M. le Préfet Edmond Robert avait d'ailleurs et très heureusement préludé à cette fête populaire. En terminant, disons qu'en moins d'une heure, on peut faire l'ascension du mont Simon, dont la crête n'est qu'à 2 km 800 de la gare su chemin de fer, et par un chemin à pente normale de dix centimètres par mètre, se développant en lacets du nord au midi.
La vue des panoramas sur les lacs, Grenoble et Chambéry, et sur les pics de l'Oisans, du Trièves et de la Drôme, a impressionné non seulement les promeneurs de Grenoble et des environs, mais encore et surtout les anciens Murois, tous enchantés de la construction du Chemin des Pauvres.
Ajoutons que dans l'esprit des habitants de La Mure, la "Fête de la Fraternité" sur le Mont Simon est définitivement créée et que chaque année elle devra se reproduire au mois de juin.
La commission des petits propriétaires intéressés au chemin de Simon et la municipalité de La Mure peuvent être fières à juste titre de l'oeuvre qu'elles ont entreprise avec tant d'entraînement et conduite à si bonne fin en peu de temps. C'est réellement prodigieux, étant donné surtout le peu de ressources dont elles ont disposé.
Nous engageons vivement les promeneurs du dimanche surtout, venant de toutes les direction pour visiter la ligne de chemin de fer, à aller admirer les incomparables panoramas vers la montagne de Simon, dont l'ascension constitue un tout petite promenade aux environs de La Mure.
Felix Faure, en janvier 1897, recevant les représentant de l'Isère, avait manifesté son intention de faire
une rapide excursion dans la région montagnarde de l'Isère, il indiqua lui-même la Mure avec retour par Vizille.
Le 12 avril, le Maire de La Mure fut admis à l'Elysée, le président de la République confirma son intention
de s'arrêter à La Mure une heure ou deux.
Le conseil général de l'Isère dans sa session d'avril vota une subvention spéciale pour aider La Mure à recevoir
dignement le président. La ville se mit à l'ouvre pour organiser une fête digne du premier magistrat de la
république.
Le 28 juin, le préfet de l'Isère, le maire de Grenoble et Chion-Ducollet sont de nouveau reçus par le président qui
leur fait part de sa décision de ne pas honorer sa promesse. Qui sont les "jaloux", "les politiciens dauphinois" qui
sont intervenus ? Malgré l'insistance d'Edouard Rey et Durand-Savoyat, sénateurs et de Vogéli, député, la décision
fut maintenue. En petite compensation, le Conseil des Ministres décida que la Mure aurait la visite du Ministre
de l'instruction publique après les fêtes de Grenoble.
Ce contretemps organisé par les adversaires politiques de Chion-Ducollet a été beaucoup commenté surtout en sa défaveur.
Les fêtes présidentielles ont eu lieu à Grenoble les 3 et 4 août. Chion-Ducollet a reçu des mains du président
de la République, sur le perron d'honneur de la préfecture les insignes de la Légion d'honneur.
Le lendemain, 5 août, une énorme affluence attend à la gare l'arrivée du train transportant M. Rambaud, ministre
de l'Instruction publique, M. de Luze, préfet de l'Isère, Emile Durant-Savoyat, sénateur, Felix Vogéli, député, le recteur
et l'inspecteur d'académie. Le train est arrivé à midi, le maire est descendu du wagon avec la croix de Chevalier
de la Légion d'honneur sur sa redingote, sous les acclamations de la foule.
On peut lire le compte rendu de cette journée muroise mémorable dans le registre
des délibérations du conseil municipal.
Accueil des personnalités en gare de La Mure
Chion-Ducollet au balcon
Les personnalités arrivent à l'hôtel de ville
Chion-Ducollet relate ces journées peu ordinaires dans son bilan :
Les grandes manoeuvres militaires de la 27e division eurent lieu en septembre 1900 dans la région Trièves-Matheysine.
La veille de la revue d'honneur, la ville de La Mure eut à cantonner ou à loger 5.000 hommes.
Tous les officiers, sans exception, furent logés. La revue d'honneur eut lieu le 20 septembre 1900 sur le plateau de Payon.
14.000 hommes de toutes armes y prirent part.
Des tribunes furent construites par la Municipalité.
Tout se passa sans accident regrettable et sans incident.
Ce fut une véritable fête militaire pour La Mure. Le Maire avait fait afficher une proclamation aux habitants ;
elle enchanta les troupes et les officiers.
La population se prêta de bonne grâce au cantonnement et au logement.
Des arcs de triomphe furent construits par les soins de la Municipalité aux principales entrées de la Ville.
Les monuments publics et les habitations particulières furent abondamment pavoisés.
A la revue d'honneur, le général en chef Zédé, gouverneur militaire de Lyon, en saluant la Municipalité au-devant
de sa tribune, suivi de son état-major, adressa des remerciements et des félicitations à
la population muroise en la personne de son maire, pour le bon accueil fait aux troupes et surtout pour l'organisation
du cantonne-ment qui n'avait rien laissé à désirer.
A la séance suivante du Conseil municipal, le Maire adressa à son tour ses remerciements sincères à la population
pour le concours empressé qu'elle lui avait prêté en cette circonstance et des félicitations au personnel municipal
pour la fidèle exécution de ses ordres et le dévouement que chacun avait déployé.
Nous avons le droit de dire que les grandes manouvres et une revue d'honneur dans un pays, constituent un lourd fardeau
pour la population, mais plus spécialement pour le Maire sur lequel pèsent toutes les responsabilités.
La relation de ces "faits mémorables" a été consignée dans le registre des délibérations municipales, à la suite de la séance
du 4 novembre 1900.
La parade militaire sur Paion
Soldats du 140e régiment d'infanterie
Menu réalisé par Georges Pelloux
PROGRAMME
Samedi 19 septembre
- A 8 heures du soir, grande retraite aux flambeaux par l'Harmonie Muroise et par les clairons et tambours des
sapeurs-pompiers.
Dimanche 20 septembre
- A 5 heures, réveil en fanfare par les clairons et tambours des Sapeurs-pompiers - Pavoisement général des rues
et édifices communaux.
- De 7 heures à 8 heures, grandes courses régionales de bicyclettes, avec prix. Itinéraire : La Mure, La Motte d'Aveillans,
Notre-Dame-de-Vaulx, virage à Laffrey, Arrivée à La Mure.
- A 8 heures, mise en marche des nouveaux appareils d'arrosage et d'incendie, cascades et châteaux d'eaux dans les divers
quartiers.
- A 9 heures, ouverture des jeux dans les quartiers de la ville.
- A 11 heures 6min. gare de Peychagnard-Crey, réception des invités par la Municipalité, visite en car alpin des captages
de Perrouzat et de la citerne de la Prête sur Pierre-Châtel, vin d'honneur.
- A midi 15, réception des invités à l'entrée de la ville par le Conseil Municipal et l'Harmonie muroise.
- Visite du réservoir dans le flanc de la montagne de Simon.
- Concert par l'Echo de la Matheysine.
- Grand défilé dans les rues de la ville pour se rendre dans la salle du banquet.
- A 1 heure, banquet officiel; salle du Théâtre - durant le banquet, concert par l'Harmonie municipale.
- A 3 heures, visite de la ville et de ses monuments.
- A 4 heures 30, départ des invités en car alpin par les lacs pour Vizille, Uriage, Grenoble.
- De 3 heures à 5 heures, continuation des fêtes de quartiers : Place de la Liberté, mat de cocagne, course en sac,
jeux divers avec prix.
- A 7 heures, illuminations générales de la ville et de ses monuments publics.
- A 8 heures, grand feu d'artifice au rond-point du Rondeau.
- A 9 heures, bals dans les divers quartiers de la ville, permission de la nuit à tous les établissements.
Lundi 21 septembre
- Grand concours de boules au magnifique boulodrome de la place des Capucins.
C'est un grand jour pour Chion-Ducollet qui reçoit une pluie d'éloges, Le registre des délibérations du conseil
consacre plusieurs pages à cette fête des eaux.
Voici le comte rendu qu'en fait Chion-Ducollet dans son bilan :
De toutes les fêtes officielles qui ont eu lieu au cours de notre mandat municipal, aucune n'a été plus belle,
plus spontanée dans sa simplicité, que celle qui fut donnée en l'honneur du Maire à l'occasion de son
élection à la députation.
Elu le 20 mai 1906, au scrutin de ballottage, après une lutte acharnée, l'élection fut attaquée devant la Chambre,
principalement par M. Perrier, député actuel, au nom de son Comité.
La Chambre passa outre, dédaigna les 'protestations dont il ne fut fait mention que pour mémoire, dans le rapport
de M. Justin Godard, député du Rhône.
Cette validation augmenta encore la satisfaction des Murois. En juin suivant, une fête populaire magnifique
fut organisée par la population.
Rien d'officiel, tout fut fait de bon coeur.
Un superbe banquet, offert au député, eut lieu dans la salle des Capucins.
A son entrée dans la Ville, à la descente du train, le Maire-Député fut réellement touché du témoignage
spontané de sympathie que lui offrirent ses administrés.
Cette fête, cette manifestation, sont restées si profondément gravées dans le cour du Maire Chion-Ducollet,
qu'il n'a pu résister à la satisfaction de les rappeler dans le résumé bien succinct de sa pénible et
laborieuse administration. Elles ont aussi constitué un grand réconfort après tant d'avanies subies !
Jean Garnier dans La Mure autrefois y consacre 7 pages très illustrées :
Quelle fête magnifique, merveilleuse, incomparable, les Murois ont offert à leurs innombrables
visiteurs !
De bonne heure, par toutes les routes, par toutes sortes de véhicules venus de localités fort
éloignées, la foule envahissait le pittoresque chef-lieu de canton.
Les rues de La Mure sont en effet richement et copieusement décorées. dès les premiers pas
on constate que tous les habitants sans exception ont voulu participer à la réjouissance
publique. Toutes les maisons sont pavoisées ; des guirlandes s'entrecroisent au-dessus des rues,
des arcs de triomphe souhaitent la bienvenue aux visiteurs.
Il est midi ! C'est l'heure solennelle, l'heure où les diverses unités de la cavalcade
se massent sur la place des Capucins. Les chars sont assemblés et le cortège va partir. Mais
auparavant, la commission se rend au domicile de M. Chion-Ducollet député, maire de La Mure,
pour le remercier du généreux appui qu'il a accordé aux organisateurs des fêtes. Très cordialement
M. Chion-Ducollet les assure de son complet dévouement et quoique légèrement fatigué, il veut
assister de son balcon, au défilé du cortège...
Char de la musique sur les Capucins
Entre la gendarmerie et le jardin de ville
Le char de la Reine
LES BANQUETS
Le banquet était un grand moment de chacune de ces fêtes, nous avons donné deux exemples de menus mais pour compléter salivez à la lecture du gourmand article de Guillaume Benoist "Plateau-repas : des menus peu menus. La cuisine bourgeoise en Matheysine d'après des menus des XIXe, XXe, XXIe siècles." dans Mémoire d'Obiou N°24 de mai 2019.
L'hommage d'un touriste à la gastronomie muroise en 1919 :
Dans la salle où fluide, s'épand la fraîcheur des parfums, voici qu'un cuisinier, raffiné, subtil, vous convie aux griseries délicates de la table. Truites amoureusement épanouies en l'eau pure de certains lacs, puis rituellement pénétrées des adorables mollesses du beurre ; écrevisses comme orfévrées d'un précieux travail d'épices ; gratins classiquement et régionalement délectables ; poulets d'une émouvante tendresse ; oeufs qui ne connurent qu'une aube (celle de leur consommation) -- tout cela vous conquiert, vous envahit, sans effort, vous enveloppe d'un indéfinissable bien-être, où s'illumine une confiance quasi céleste en la douceur et en la grâce de la vie. Mieux qu'en un cours de savante philosophie, il vous est confirmé ici ce que la légèreté de l'âme doit à la satisfaction de l'estomac.