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LA CARRIÈRE DE MARBRE VERT DE LA CHINARDE

Itinéraire
Départ de la route forestière entre les Mazoirs et le Villard, piste et sentier, la dénivellée est de 800 m assez raide pour arriver au col, la carrière est au pied du sommet de la Chinarde (point rouge). En montant pensez aux ouvriers qui descendaient les blocs pratiquement par le même chemin !

On a accès aussi par le col de l'Oullière ou par la Morte.

       itinéraire

Cette sortie est en continuité géologique avec celle du col de l'Oullière, elle permet de voir le troisième composant des ophiolites, les roches les plus profondes : les serpentinites.
Serpentine = minéral ; serpentinite = roche.

la carrière vue du col de la Chinarde
La très modeste carrière vue à l'arrivée au col de la Chinarde.

la carrière vue de près
On voit l'affleurement assez fracturé, et un tas de déchets conséquent.


La serpentinite ou péridotite serpentinisée

La roche mère est de la péridotite, la roche principale du manteau supérieur donc normalement située 10 km sous une croûte océanique ou 30 à 60 km sous une croûte continentale. Il n'est toujours pas possible d'accéder à ces profondeurs et de faire des prélèvements, aussi nous la connaissons par ces morceaux de manteau qui se retrouvent portés un jour en surface, par la tectonique, comme ici, ou par ce que nous remontent certains volcans. C'est une roche le plus souvent vert noirâtre riche en olivine.
Les minéraux magnésiens, les olivines, de la péridotite ont été transformés par l'action de l'eau en serpentine, ce qui donne à la roche son aspect verdâtre, marbré, nuancé de jaune, brun rouge ou gris avec un éclat gras. C'est l'aspect peau de serpent qui a donné son nom, de même pour les ophiolites (ophis = serpent).
La serpentine n'est pas un minéral unique mais une famille de minéraux. Ici c'est de l'antigorite, minéral compact verdâtre avec de beaux reflets que l'on a comparé à une peau de serpent, d'où son nom générique. Une autre forme, la chrysotile est fibreuse. Ce sont ces minéraux qui sont à l'origine de l'amiante, du talc, de la stéatite qui ont été beaucoup exploités dans le Queyras.

photo antigorite
Serpentine sous la forme antigorite comme ici à la Chinarde

Une belle roche décorative

La serpentinite a de tout temps été très appréciée en architecture sous le nom de « marbre vert », elle est par exemple très utilisée à Florence, présente dans des colonnes ou en revêtement de nombreux monuments, associée pour le contraste à du marbre blanc ; les blocs viennent de Prato sous le nom de « verde di Prato ». La serpentinite de la zone interne des Alpes, a été très exploitée, par exemple le « vert de Maurin » en Ubaye, dans des carrières situées sur un filon de 200 m de long et 50 m de large à 2 000m d'altitude. Ceci du Ve siècle jusqu'à 1960, il y a eu jusqu'à 100 ouvriers. Cette serpentinite des Alpes a été très utilisée dans les monuments parisiens. A noter qu'elle est, géologiquement, beaucoup plus jeune que celle de la Chinarde, puisque c'est de la croûte océanique de l'océan alpin (150 millions d'années).


Histoire de la carrière

La carrière de la Chinarde est beaucoup plus modeste que celle de Maurin et elle présente deux inconvénients majeurs :
- l'absence de chemins carrossables à proximité, il faut l'atteindre à pied après une longue marche. Il faut descendre les blocs sur 800 m de dénivelée en pente raide.
- la roche est fracturée après avoir subi la tectonique hercynienne et alpine, il est difficile d'isoler de gros blocs homogènes.

C'est Emile Gueymard le découvreur de la carrière. Il écrit une lettre au préfet le 19 septembre 1839

[...] La carrière dont il s'agit est celle de la belle serpentine dont je vous ai entretenue lors du Conseil Général. Je vous ai dit dans le temps que j'étais l'auteur de cette découverte et je m'estime heureux d'en faire hommage à l'industrie.
[...] Je viens vous recommander cette exploitation avec instance, de la prendre sous votre protection spéciale. J'ai rempli mon mandat en faisant la découverte, il vous appartient de mettre au profit de votre département et de la France une substance belle et recherchée. Toutefois son élévation et son accès difficile exigent impérieusement votre appui et vos sollicitudes de tous instants.

Il recommande par ailleurs : "on n'emploiera la poudre que dans le cas d'urgence pour ne pas fendiller la serpentine".

Le 10 novembre 1839, la carrière est adjugée pour 100 F/an à M. Perroncel, gérant des usines de Bon Repos, pour 9 ans.
En 1849, elle est adjugée 18 ans pour 100 F/mois à Jean Antonin Joseph Martin employé aux usines du Bon Repos, fondé de pouvoir de MM. Gilbert et Brutin, syndics.
En février 1851, le bail est résilié suite à la faillite de Perroncel contre 625 F.
Les ADI (cote 2O553/5) ne nous renseignent pas sur l'exploitation réelle durant toute cette période et ne nous dit rien sur la suite.

Un excellent article paru dans Mémoires d'Obiou N°5 de 1999 : « Les marbriers de La Mure et la curieuse histoire des colonnes de Fourvière » par Dominique Tritenne et Bernard de la Fayolle nous permet de continuer l'histoire.
En 1851, la marbrerie est reprise par M. Astréoud qui développe l'entreprise, il s'associe en 1877 avec Auguste Escalle qui deux ans après reste le seul à la tête, celui-ci s'associe en 1881 avec son fils Gustave qui revient d'une longue formation auprès de l'architecte de Fourvière.
Quelle a été l'emprise de la marbrerie sur la carrière de la Chinarde pendant cette période ? Une commande de 6 colonnes de 2m,75 pour Notre-Dame-de-Fourvière va provoquer une intense activité durant l'année 1890 pour cette carrière située à 1860 m d'altitude loin de tout chemin carrossable. Auguste Escalle raconte, dans une correspondance suivie, l'avancement de l'extraction et du transport des blocs. Le travail commence en juin 1890 et se termine fin décembre :

Enfin, après mille péripéties qu'il serait trop long de vous raconter, je suis arrivé au terme de mes misères ; dans le courant de la semaine prochaine, toutes les colonnes seront rendues à la Mure. Il ne me reste que deux fûts supérieurs à descendre, ce que l'on fait en ce moment à raison de trois jours par fût. Cela a été un vrai travail de Romain.

Après le travail de façonnage début 1891 les colonnes sont expédiées fin mars. Deux arrivent brisées sur le chantier de la nouvelle église.

l'aspect peau de serpent
L'aspect peau de serpent

traces de barre à mine
Traces de barre à mine, un peu étonnant dans cette roche que l'on voit déjà bien fracturée. Escalle n'a pas utilisé la poudre noire pour les colonnes.

traces d'outil
Traces d'outils qui délimitent un nouveau bloc

Une remarque sur le mot marbre : pour le carrier toute roche qui put se polir est un marbre, pour le géoloque ce mot est réservé au calcaire métamorphisé c'est à dire recristallisé par les conditions de pression et de température.

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