Dans cette partie amont de la Bonne entre le Désert et le fond de la vallée nous sommes en haute montagne avec plusieurs sommets au-dessus de 3 000 mètres. Le point culminant, l'Olan, atteint 3 564 mètres. La vallée est profondément entaillée dans les granites, les gneiss et les migmatites, résultat du travail des nombreux glaciers qui se sont succédés.
La Bonne qui vient du fond de la vallée est grossie à l'entrée du Désert par de nombreuses et importantes sources.
Une source, un peu au-dessus du lit principal en rive gauche, se déverse dans la Bonne.
Une autre source un peu en aval de la précédente.
Quand on observe le village avec un peu de hauteur, par exemple, comme le montre la photo Google, vue de la
montée au col de la Vaurze, on ne peut s'empêcher de se demander quels forfaits avaient commis les premiers
habitants pour avoir été refoulés dans cet endroit, à 1 250 mètres d'altitude, à l'extrême limite du vivable,
sur cet énorme cône de déjection,
sous la menace des avalanches et les ruissellements des eaux. De plus à proximité des falaises
du pic de Valsenestre qui domine à plus de 1500 mètres. Les nombreux clapiers sont le témoignage du
travail opiniâtre de nombreuses générations pour créer des espaces de culture.
Il faut aussi se rappeler que jusqu'à 1750 la montagne est un milieu très hostile où il ne faut pas
se risquer, le Mont Blanc est encore "la Montagne
Maudite". Les naturalistes Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799) et Déodat de Dolomieu (1750-1801)
vont, par leurs études et leurs observations, jouer un grand rôle dans le changement de regard vis à vis des
montagnes. Ce n'est qu'en 1864 que les habitants des Ecrins vont voir arriver de riches anglais qui viennent
escalader les sommets. En 1870 les principaux sommets du Haut-Valjouffrey ont été gravis.
Un énorme cône de déjection végétalisé. Les avalanches sont déviées vers l'amont par des aménagements
au sommet du cône.
Les taches grisâtres sont les nombreux et imposants pierriers.
Aujourd'hui le Désert, désenclavé depuis les années 1950, est un village
très apprécié des touristes et des randonneurs. En 1973 le parc national des Ecrins est créé, le hameau est
situé dans la zone externe, la zone interne commence à un peu plus de 1 kilomètre en amont. Il y a obligation
de garer sa voiture un peu en dessous des premières maisons, ce qui rallonge l'accès au refuge de Font
Turbat mais qui protège le village.
Pour les toits la tôle a remplacé le chaume après des tentatives d'utiliser le produit des ardoisières situées dans
le vallon de la Laisse, ce ne sont pas des ardoises stricto sensu mais des plaques de calcaire schisteux,
de faible qualité aggravée par la présence de pyrite de fer, les toits étaient lourds et de faible durée de vie.
Entrée du hameau, l Désert en Valjouffrey d'Isère à 4 heures du soir septembre 1906
Huile sur toile de Merle, collection Musée Matheysin.
Une grange de belle facture construite avec les matériaux locaux.
L'école a été reconvertie en gite de randonnée.
On trouve de nombreuses caves construites en dehors des habitations.
Des encadrements de portes et de fenêtre avec une très belle syénite (voir plus bas le paragraphe "roches").
A la sortie du Désert on traverse la faille qui traverse la vallée (en vert sur la photo de tête) qui vient du
Pic de Valsenestre et va dans le Valgaudemar en passant par le col de la Vaurze. Elle sépare le bloc du Chaillol du
Bloc de la Muzelle dans lequel la vallée se poursuit. Du Lias et du Trias sont pincés entre les deux blocs. Les cols
dans les parties plus tendres, col de Côte Belle et col dela Vaurze dans le Lias, col des Marmes dans la dolomie
triasique, entre les deux la spilite plus dure donne les petits pitons. Ceux-ci se détachent bien sur la photo
ci-contre, côté nord vers les cols de Côte Belle et des Marmes.
Nous sommes ici dans des roches hautement métamorphiques (gneiss) ou qui ont été partiellement (migmatites)
ou totalement fondues (granites)
pendant et à la fin de l'orogenèse hercynienne. Les nombreuses couleurs et annotations de la carte géologique
témoignent de la grande variété. Celle-ci est due aux différents traitements thermiques et à la composition chimique
des roches au départ.
Les syénites (vaugnérites) que nous avons vues dans les encadrements de porte au Désert ont été exploitées dans le vallon
de Malentraz, elles existent en enclaves
décamétriques (notées ση sur la carte géologique) dans le granite du Péou de Saint Maurice.
Les parties blanches réparties en volutes représente ce qui reste dans la roche du liquide à composition granitique
dont une partie expulsée a créé les granites d'anatexie. Les parties plus sombres et massives sont restées solides.
Le granite de Turbat-Lauranoure sur lequel on marche de la cascade de la Pisse jusqu'à la fin du vallon.
C'est un granite clair (leucocrate).
Noté γ2 sur la carte géologique Saint-Christophe.
Le granite du pic de Valsenestre que l'on peut voir au parking avec ses mégacristaux de feldspaths potassique, verdâtre
suite à la chloritisation du mica noir (biotite).
Noté ργ2 sur la carte géologique La Mure.
Les bordures sont tapissées d'éboulis avec parfois de très gros blocs comme on le voit sur la photo ou
de cônes d'avalanches.
Au centre haut, le massif des Arias.
Dans ce paysage minéral, l'eau est partout présente. Ici, la cascade de la Pisse qui nous donne la hauteur atteinte par
le glacier principal et le niveau où rejoignait le glacier secondaire venant du vallon de la Haute Pisse.
L'Olan, massif d'amphibolites posé sur le granite de Turbat, bouche le fond de la vallée (anciens basaltes métamorphisés).
Avant d'atteindre les refuges de Font Turbat, il reste à grimper une montée raide dans le flanc nord.
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
- Pages du site geol-alp :
Valjouffrey - Valsenestre : bassin supérieur de la Bonne ;
Le Désert en Valjouffrey, Font Turbat : vallon et crêtes des sources de la Bonne
- J.DEBELMAS, A.PÊCHER, J.C.BARFÉTY, Guide géologique du Parc national des Écrins et carte géologique,
BRGM.
- René Lanthelme, La Bonne Source
- Marie-Noëlle Bonnerot, Joël Challon, Jean-Paul Zuanon, Le refuge de Font-Turbat, Edition les
Amis du refuge de Font-Turbat, 2011.
- Site du parc des Ecrins
21 Juillet 2015 - Un phénomène naturel récurrent mal intégré par l'homme
Le Dauphiné Libéré du 24 juillet
Le problème de l'eau n'est pas grave, il sera vite réparé, ce qui n'est pas le cas des mètres carrés de culture ou pâturage qui avaient été durement gagnés par les anciens.
Lors des travaux pour détourner les avalanches, le passage de laves torrentielles n'a pas ou mal été évalué, le torrent boueux s'est donc recrée un passage pour rejoindre la Bonne en créant de gros dégâts.
Voir La Bonne Source.
Un photo prise par René Lanthelme le lendemain du passage de la coulée boueuse qui a ravagé une partie des terrains à l'amont du village. (A comparer avec la photo Google plus haut)
Faute de pouvoir suivre son lit traditionnel la coulée en a creusé un en ligne directe vers la Bonne.
Bien maigrelet ce passage prévu pour les eaux à travers la tourne pour rejoindre le lit traditionnel !
Le point blanc désigne l'endroit de la photo suivante.
Les dégâts ont été réparés, mais sans apporter de solution à la cause de ces dégradations. La Laisse réclame un lit pour aller à la Bonne, elle n'a toujours pas obtenu satisfaction, mais elle est têtue et patiente.
Finalement assez peu patiente puisque trois ans plus tard...
Le Dauphiné Libéré du 27 juillet 2018
Pour les photos et des commentaires de bon sens voir La Bonne Source.