Itinéraire
Au bout de la route qui traverse le hameau des Rioux de Prunières (chevalement du puit de mine), on
continue dans le fond du vallon sur environ 250 m, bien regarder pour ne pas dépasser le rocher éboulé sur lequel
est la meule.
Le tracé des failles de Prunières et des Merlins est très approximatif par manque d'affleurements significatifs.
Alain Belmont, professeur d'histoire moderne à l'Université de Grenoble a récemment retrouvé l'histoire de la fabrication
des meules. Elle avait été oubliée malgré l'importance qu'elle avait représentée pour la nourriture journalière de la
population, localement le temps avait caché les traces des meulières et leur souvenir dans la mémoire des habitants.
C'est la lecture des archives mentionnant des achats et des trajets de meules qui a commencé à éclairer cette histoire,
les recherches sur le terrain ne sont venues qu'en deuxième temps.
Voir en bas de page les références des deux tomes qui racontent le travail et les résultats de 10 ans
d'un énorme travail collectif.
Alain Belmont fait ressortir l'évolution des meulières, d'abord locales, au plus près des moulins, de qualité
très variable et souvent mauvaise avec des conséquences sur la qualité du pain et sur les dents des clients.
Les meilleures se sont imposées et ont approvisionné les moulins de la région. A leur tour, celles-ci ont laissé
la place à quelques meulières qui sont devenues industrielles. Celles-ci ont fini par disparaître, les moulins modernes
ne faisant plus appel à cette technique.
La plus ancienne mention de cette meulière est 1383, le châtelain de La Mure note l'achat de 3 nouvelles meules. Prunières, d'ailleurs située dans un lieu-dit dénommé "Les Molières" depuis 1668. Meulière locale au départ elle est devenue régionale du fait de sa bonne qualité. La production totale est évaluée à une centaine de meules. La fin de l'extraction se situe vers 1820, peu de meules étant fournies depuis 1793. En 1696 on "importe" la première meule de Quaix pour le moulin de Laffrey, malgré les frais de transport, la meilleure qualité imposera cet approvionnement qui remplacera peu à peu la fourniture locale.
La présentation que l'on trouve sur le site cité en référence :
Dans un vallon sur les flancs de la montagne du Senépy, une épaisse couche de conglomérat calcaire a été
entamée sur au moins deux chantiers, l'un à l'ouest du vallon (meulière communale), l'autre à l'est (meulière
de la famille Bonnard). Ce dernier présente un front de taille linéaire formant une petite falaise étirée sur
quelques dizaines de mètres. Les traces d'exploitation sont peu visibles, sauf sur un bloc laissé en réserve,
où apparaissent une alvéole d'extraction (diamètre 152 cm) et une ébauche de meule semi engagée (143 cm de
diamètre, 29 cm d'épaisseur).
Voir cette unique meule accrochée au rocher est très émouvant. Mais il est difficile d'imaginer l'activité
des meulières dans ce vallon étroit, réceptacle des matériaux éboulés, aujourd'hui véritable fouillis envahi
par la végétation.
La trace d'extraction d'une meule en bas du rocher partiellement recouverte par des éclats de taille ou des alluvions.
L'arriére du rocher.
Une vue rapprochée de la meule.
Ce vallon encaissé, parcouru par la faille des Merlins, est recouvert de roches issues des deux parois.
On trouve des blocs de dolomie sombre et massive, des blocs de calcaire de Laffrey.
Le rocher éboulé dans lequel on a extrait des meules est un conglomérat, qui n'est pas tertiaire comme le
suggère la fiche du site (avec un point d'interrogation), nous n'avons pas localement de dépôt tertiaire.
Ce conglomérat semble être triasique mais avec une contradiction concernant l'analyse chimique qui ne détecte que
des traces de magnésium constituant majeur de la dolomie dont il nous semble voir des éléments.
Le rocher n'est pas homogène, certaines parties ne sont pas très compactes, d'autres sont en travertin.
Il faut tenir compté aussi qu'il a subi de l'altération dans ce lieu humide.
Aspect du conglomérat de la meule.
Un aspect de travertin dans une partie du rocher.
Pour ceux qui veulent en savoir plus :
- Alain Belmont, La pierre à pain, 2 tomes, 2006, Presses universitaires de France.
- Le site d'Alain Belmont sur les meulières d'Europe
- Mémoire d'Obiou n°12, pp.129-142, l'article d'Alain Belmont La meulière de Prunières.
- Page La Mure de Geol-alp
A la fin de son étude, Alain Belmont a pu, avec l'aide du Conseil général, faire nettoyer et réapparaître certains sites d'exploitation. La visite de ces sites avec ces traces d'extraction et ces meules encore accrochées est très intéressante et très émouvante en pensant au travail nécessaire pour dégager une meule en bon état.
La trace de 3 meules sur 1 des 13 fronts de taille de Quaix-en-Chartreuse, lieu-dit Crêt de la Molère.
Grès microconglomératique tertiaire. Exploitation du 16e au début du 19e.
Photo ci-contre, une meule n'a pas été détachée, on voit une cassure en partie supérieure. On ditingue
bien les encoches (les emboîtures) qui permettent de détacher la meule à l'aide de coins de fer ou de bois.
Production de 700 à 2400 meules.
La carrière dans les Ecouges, lieu-dit La Molière, 56 alvéoles sur 82 m2, grès
microconglomératique. Production évaluée de 200 à 700 meules.
Mont-Saint-Martin, un circuit pédagogique a été tracé dans la zone d'exploitation, lieu-dit Les Merlières.
La roche est une brèche de calcaire urgonien générée par l'effondrement de la crête du Sappey.
Production estimée de plusieurs milliers de meules du 13e au 16e siècle
La caverne aux fées, un des 3 sites importants d'extraction (10 000 à 20 000 meules) du Mont Vouan , Haute-Savoie.